L'estime de soi : un concept multidimensionnel
Le concept de l’estime de soi est un sujet vaste et a fait l’objet de différentes recherches, c’est un concept multidimensionnel, retrouvez ici ce qui fondent votre estime de vous-même.
Le concept de l'estime de soi est un sujet vaste et a fait l'objet de différentes recherches, c'est un concept multidimensionnel. Je vais ici reprendre plusieurs articles en sciences humaines (dont vous pourrez retrouver les sources en fin de lecture), pour éclaircir avec vous ce qu'est l'estime de soi et en comprendre sa construction. Nous verrons tout d'abord que l'estime de soi peut être envisagée comme une construction intrinsèque de l'individu, en tant que composante de base, stable dans le temps ; puis nous verrons que le regard de l'autre a une forte influence sur l'estime de soi, la rendant fluctuante dans le temps, et qu'elle trouve racine dès la toute petite enfance avec le lien parents-enfant. Enfin en conclusion nous verrons comment il est possible de la restaurer et la renforcer.
1-L'estime de soi : une construction intrapersonnelle
C'est tout d'abord James en 1890 qui est le premier à définir l'estime de soi dans le cadre de la psychologie. Pour lui, il s'agit de la conscience de la valeur du Moi. Ce serait une évaluation intime de soi en lien avec ses propres valeurs. La perspective de James est intrinsèque. L'estime de soi dépend de la perception que la personne a d'elle-même, de son sentiment d'avoir de l'importance et de se sentir unique. Dans ce cadre, l'estime de soi est une construction de base et serait stable dans le temps.
Walker et Avant (1995, 2005) ont défini plusieurs attributs de l'estime de soi :
- La valeur accordée à soi-même : est une évaluation intime de ses valeurs et le jugement favorable ou non envers soi-même. Elle est la base du respect de soi. S'accorder de la valeur permet de mieux prendre des décisions. Cet attribut de l'estime de soi est lié à la confiance en soi et permet de pouvoir s'affirmer.
- L'acceptation de soi : il s'agit de 1ère conséquence de la valeur accordée à soi-même. C'est l'Amour propre et l'authenticité envers soi. C'est l'acceptation de nos forces et de nos limites. Avoir de la reconnaissance pour ses forces et ne pas dévaloriser ses faiblesses. Cet attribut découle du sentiment de dignité et permet des relations facilitées avec les autres.
- Le sentiment de compétence : il permet d'affronter les situations avec succès. Celui-ci influence la motivation, l'engagement et la persévérance. Une personne avec un fort sentiment de compétence aura tendance à être plus résiliente, c'est-à-dire qu'elle pourra plus facilement se reconstruire après un choc.
- L'attitude envers soi-même : est la capacité à se préparer à l'action, elle exerce une influence dynamique sur nos comportements. Avoir un dialogue intérieur positif, doux et bienveillant malgré des évènements malheureux ou des échecs aident à être plus serein et limite le stress.
- Le respect de soi : est un sentiment d'égard, de considération envers soi, ses valeurs, son caractère et sa dignité. S'aimer avec suffisamment de confiance pour pouvoir se définir, s'affirmer et se différencier face aux attentes et aux demandes de l'autre.
Ces attributs vont dans le sens d'une conception intrinsèque, intrapersonnelle, de l'estime de soi. Dans cette perspective, l'estime de soi découle de la comparaison entre les caractéristiques perçues du soi, que l'on peut appeler soi réel et celle d'un soi idéal, c'est-à-dire ce que l'on souhaiterait être. En fonction du résultat du rapport succès / aspirations personnelles de l'individu, alors celui-ci aura une bonne ou une mauvaise estime de lui-même. Un idéal de soi trop « parfait » entrainera une estime de soi basse car les attentes deviennent inatteignables.
Nous avons vu ici que l'estime de soi a des bases intrinsèques à l'individu, cependant, soustraire l'estime de soi de la relation à l'autre n'est pas pertinent.
2-L'estime de soi : une construction interpersonnelle
--> Une construction sociale
Plusieurs auteurs indiquent qu'il s'agit d'une construction sociale, que l'estime de soi se façonne en fonction des interactions, des opinions et des jugements. Elle apparait ainsi fluctuante dans le temps. Christophe André explique que l'estime de soi se situe à la croisée de trois composantes essentielles : « l'aspect comportemental : elle influence nos capacités à l'action et se nourrit en retour de nos succès, l'aspect cognitif : elle dépend étroitement du regard que nous portons sur nous, mais elle le module aussi à la hausse ou à la baisse, et l'aspect émotionnel : elle dépend de notre humeur de base, qu'elle influence fortement en retour. »[1]
Il indique aussi que l'estime de soi peut avoir des niveaux variables en fonction des domaines et de l'importance qu'on leur donne, ce n'est pas une donnée linéaire. Ces domaines peuvent notamment être ceux de l'aspect physique, celui de la réussite scolaire / statut social, de la popularité etc. En fonction de l'importance que l'on va donner au domaine alors la réussite ou l'échec dans ce domaine n'atteindra pas de la même manière notre estime de nous-même. Ainsi, l'estime de soi est en lien avec le regard des autres et se positionner par rapport à son environnement immédiat permet d'ajuster celle-ci.
De nombreuses études montrent notamment l'importance de la comparaison à l'autre, notamment avec l'expérience de « monsieur propre » et « monsieur sale » : dans le cadre d'un entretien d'embauche, les sujets évalués sont confrontés soit à la venue d'un concurrent « monsieur propre », avec beaucoup de charisme, beau, propre sur lui, soit à la venue d'un « monsieur sale », peu sûr de lui, mal habillé etc. Dans les réponses données aux questionnaires dans lesquels étaient glissés différents items sur l'estime de soi, il apparait que les personnes confrontées au concurrent « monsieur sale » montrait une estime d'eux même plus élevée car se sentait supérieur à la personne qu'ils avaient à coté d'eux. A l'inverse, les candidats confrontés à « monsieur propre » montraient une estime d'eux même plus basse. Ainsi, se sentir supérieur à l'autre permet de renforcer une image de soi positive renforçant l'estime de soi.
L'estime de soi va donc varier en fonction du regard et des jugements des autres et aussi en fonction de l'importance que l'on donne au domaine dans lequel nous allons nous comparer où être attentif au regard de l'autre. Les théories de l'attachements vont même plus loin et nous montre que le regard de l'autre sur soi serait même à la racine de l'estime de soi dans la relation parents-enfant.
-->Les racines de l'estime de soi
Selon les auteurs attachementistes, se sentir comme une personne significative dans le regard de ceux qui nous ont élevés, est primordiale. Winnicott disait déjà en 1975 « …Avant de se voir, l'enfant se voit dans les yeux de [son parent[2]] le regardant ». De même, d'après Bowlby, si l'environnement a répondu de manière suffisamment rapide et adéquate à la détresse de l'enfant celui-ci développe deux images mentales : celui d'être digne de confiance, disponible, et celui d'être digne d'amour, d'intérêt et avec de la valeur. L'estime de soi n'est donc pas seulement liée à nos compétences et capacités mais à ce que nous avons intériorisé du regard positif de l'autre sur nous-même.
Cette approche montre l'importance de reconnaitre l'ensemble des émotions comme des informations de communications. En effet, la régulation des émotions dites « négatives » (alarme, détresse, colère) est une capacité individuelle qui reposent d'abord sur une construction interpersonnelle liée à la manière dont l'environnement premier a répondu à celles-ci. Lorsque toutes les émotions ont valeur de communication[3], elles ont toutes de la valeur et le sentiment que ce que l'on ressent est juste et celui de notre propre valeur, n'est pas entravé.
Conclusion
L'estime de soi est donc une composante intrapersonnelle et interpersonnelle. L'être humain étant un « animal social » le regard de l'autre sur soi ne peut être soustrait de la construction de l'estime de soi. Nous avons vu cependant avec Walker et Avant que l'un des attributs de l'estime de soi est le respect de soi et que lorsque cet attribut est suffisamment solide, nous avons la force de nous aimer suffisamment pour nous affirmer et nous différencier des attentes et demandes de l'autre.
La construction de l'estime de soi est un chemin. Si nos premières interactions n'ont pas répondu de manière adéquates à nos besoins, nous pouvons avoir certains attributs de l'estime de soi qui n'ont pas pu se construire de manière suffisamment stable. Reconnaitre la part de responsabilité de ceux qui nous ont élevés n'est pas une manière de nous dégager de toute responsabilité personnelle, ou de jeter la faute ; c'est reconnaitre, puis accepter, qu'il y a pu avoir des loupés qui ont exercé une influence sur notre construction psychique. En les reconnaissant, il est plus facile de pouvoir réparer ses blessures.
L'espace de la thérapie peut être le lieu où il est possible de venir restaurer ce qui est incomplet ou brisé. Le regard bienveillant du thérapeute peut venir vous apporter le soutien nécessaire pour que vous puissiez vous sentir important et accepté tel que vous êtes. C'est votre part parent, à l'intérieur de vous-même, qui pourra, ayant recouvré une estime de soi plus stable, venir apporter l'amour, l'acceptation et la valorisation dont la part enfant de vous-même a manqué. Considérer l'environnement que l'on se crée autour de nous est aussi important, autorisez-vous à vous entourer de personne qui vous valorise et augmente votre estime de vous-même. Vous ne méritez pas qui que ce soit qui vous dévalorise.
Lorsque vous sentez une baisse de motivation, une difficulté à terminer une tâche ou que vous trouvez que vous avez de plus en plus de mal à faire face aux difficultés, questionnez-vous sur l'état de votre estime de vous-même, en répondant par exemple aux questions suivantes :
- Est-ce que mes aspirations sont atteignables ? Mon soi idéal est peut-être une projection trop parfaite.
- Est-ce que mon environnement proche me soutien et me valorise ? Mes émotions sont-elles entendues et reconnues de la même manière qu'elles expriment de la joie ou un état d'alarme ?
- Est-ce que je considère l'autre comme supérieur à moi ?
- Est-ce que mon dialogue intérieur est positif ?
- Est-ce que je me ressens comme digne d'amour ?
Si les réponses à ces questions vous renvoient à une faible estime de vous-même, qu'il vous semble peut-être impossible de transformer la réponse à ces questions, n'hésitez pas à demander de l'aide. Ne restez pas seul.
Photos : Shutterstock
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