Dépendance affective et anxiété
J'écris ce soir parce que je me sens très mal. Je ne sais pas vers qui me tourner. Un.e psychologue coûte cher quoi qu'il en soit et les différentes consultations que j'ai pu avoir n'ont pas mené à une quelconque amélioration, même sur la longueur.
J'écris ce soir parce que j'ai besoin de parler mais personne à qui en parler donc je le fais sur le premier forum que je trouve en lien avec ce que je ressens.
J'écris ce soir parce que je suis épuisée de me battre contre mon anxiété au quotidien. Contre mon "caractère" cyclothymique. Pas bipolaire, car c'est une vraie maladie et je ne suis pas malade. J'ai juste un souci avec la gestion de mes émotions. Un vrai souci. On s'en fout, c'est pas grave. Je ne suis pas un danger pour moi-même encore moins pour autrui. Donc je ferais mieux de me taire et de me satisfaire de ce que j'ai. On me le répète souvent, que j'ai de la chance. Évidemment. Bien sûr, si on commence à se comparer, on peut facilement trouver pire. Mais c'est malheureux, on n'est pas capable de s'en satisfaire. De ce qu'on a. Donc quoi on se tait et on subit le mal-être qu'on ressent ? Je passe mon temps à me dire, et surtout à entendre, que je suis privilégiée. Je ne suis pas en difficulté financièrement . J'ai une famille aimante qui m'aide. Je vis près de Paris, intermittente du spectacle je réussis à gagner ma vie et je mange à ma faim. Je suis aimée et soutenue. En bonne santé. Ok. Donc pourquoi je me sens aussi souvent, aussi violemment si mal alors? La question peut se poser, bien que je la refoule comme je peux. Si on creuse, on trouve très facilement le fond du problème, s'il y en a un. En tous cas la possible source de mon anxiété, la raison pour laquelle je suis dépendante affectivement, mes crises d'angoisse, peut-être, j'ai perdu mon père quand j'avais 15 ans. Ça m'a détruite. Je n'ai jamais fait le deuil, jamais, à aucun moment je ne me suis sentie "libérée" de ce poids, du poids du deuil, à aucun moment je n'ai été accompagnée correctement si tant est qu'il y ait une façon correct de suivre le deuil de quelqu'un. Je n'ai jamais réussi à accepter la mort de mon père, je l'ai subie je la subis encore parce qu'elle guide mes états d'âme, je pense à cette période de ma vie tous les ans et je me dis que c'est normal d'y penser. Que c'est sain et cohérent de passer tous les ans une période difficile. Où on y pense. Mais c'est toujours plus qu'une période et chaque étape difficile de ma vie me ramène à cette épreuve. Et je suis toujours, encore aujourd'hui, incapable d'en parler sans pleurer (et au-delà de pleurer, de manière cathartique qui peut être saine j'en sais rien, sentir le malheur au fond de mes tripes comme si on m'avait arraché un organe). Est-ce que c'est normal, encore 9 ans après de se sentir aussi dévastée quand j'y pense ? D'être absolument incapable de regarder des photos de famille qui datent de ces années-là, antérieures ou contemporaines à cette période ? Absolument incapable sans pleurer (je parle de pleurs désagréables, pas de ceux qui apaisent mais bien de ceux qui ruinent, qui ravagent l'intérieur et remettent tout en question : son propre équilibre, son état de santé, son rapport aux autres...) - son rapport aux autres. Et c'est de cela dont il s'agit et qui me torture aujourd'hui. J'écris ce soir parce que mes relations amoureuses sont dictées par ce traumatisme dont je n'ai pas fait le deuil. Et par le caractère de ma mère, malheureuse comme les pierres, que je respecte et aime plus que tout malgré nos nombreux désaccords. On me compare sans cesse à elle, et pourtant dieu sait que je ne le veux pas. (Je ne crois plus en dieu, je l'écris sans majuscule.)
Quand j'avais 16 ans, un an après le décès de mon père, j'ai eu une relation très particulière avec un garçon que j'ai aimé profondément. Plus que quiconque ; c'était un amour très particulier. C'était un garçon très particulier. Mais vraiment. Je n'exagère pas quand je dis qu'il filtrait avec un comportement..de gourou. C'est le terme. Mais un gourou personnel, comme un coach gratuit. Il m'a complètement retourné le cerveau, le coeur, j'étais sous le charme sans le vouloir et lui-même semblait ne pas avoir conscience de l'effet qu'il me faisait. Un ami d'abord, et très vite un amant. Qui ne l'est resté qu'une courte période parce que très vite son comportement a basculé dans une mise à distance incompréhensible, une fois notre relation amoureuse concrète, mes problèmes émotionnels et mon attachement beaucoup trop ardent l'ont éloigné. Nous nous sommes séparés très vite parce que je lui ai arraché des aveux de non-amour, si j'ose dire. Et c'était fini, du jour au lendemain, un abandon de nouveau. Un abandon bizarre, involontaire, mais une sensation de déchirement pire que tout, la première rupture amoureuse, j'ai 16 ans, je pensais quitter le lycée le suivre à l'autre bout du monde, (parce qu'il s'est déscolarisé, en désaccord avec le système éducatif français et tout ce qui touchait au système français d'ailleurs). Et je me suis moi même jetée dans la gueule du loup en lui arrachant la vérité de la bouche un mercredi après midi en crise d'angoisse intériorisée avant de craquer pendant des heures, des jours, un an. Abandonnée. Sans aucune explication. J'ai pris sur moi parce qu'on m'a dit : c'est normal. Personne ne me comprenait évidemment mais oui, on le sait. La rupture amoureuse. Tout le monde est passé par là. Personne ne nous comprend mais ça passe. Le temps fait tout. Tout. Je l'ai expérimenté du haut de mes ridicules 24 ans. Le temps qui nettoie. Qui fait du bien. Qui apaise. Mais il y a une chose qui ne disparaît pas, et qui me suit, et me détruit depuis des années. Et me colle, et m'empêche de poursuivre des relations saines. C'est le décès de mon père et ce deuil impossible. Parfois je me demande, sincèrement, si je ne m'invente pas une excuse. C'est une bonne excuse, quand je me sens si mal. Sortir la carte de la semi-orpheline qui ne fait pas son deuil, qui a des """daddy issues""" et c'est pourquoi je me comporte de telle ou telle manière. C'est facile à sortir. Mais pourquoi alors je ressens ce truc a l'intérieur ? Quand je craque, ces crises d'angoisse, ces sur-dramatisations, ces comportements disproportionnés, ces moments de "cafard" un peu trop imposants, toujours un peu trop impromptus, qui n'ont pas lieu d'être, parce que tu as de la chance quand même, regarde ta vie. Tout va bien.
Et quand tout va bien pourquoi tu te sens mal ? C'est ridicule. Arrête de te sentir mal. Tu n'as aucune raison. Regarde ta vie. Fais un point. Tout va bien.
Alors quand on commence à comparer, évidemment. Je culpabilise. Mais arrête de culpabiliser. Donc je n'ai plus le droit de culpabiliser non plus ; alors non : personne ne t'interdit de culpabiliser arrête de dramatiser. Tout de suite les grands mots. "comme ma mère". Je ressemble à ma mère. Beaucoup trop. Ma mère qui se tapait la tête contre les murs quand elle faisait des crises, qui nous disait à mes soeurs et moi qu'elle finirait en hôpital psychiatrique. Mais qui donne tout ce qu'elle peut pour nous. Malgré ses sautes d'humeur, que j'ai aussi. Cet excès émotionnel. Pas géré. Un besoin d'affection qui bouffe tout, qui prend le dessus, et la colère, l'impuissance face à une incompréhension générale des "gens".
J'écris ce soir pour une raison débile, en apparence. Je suis séparée depuis plusieurs jours de mon copain que j'aime énormément. Et c'est réciproque, et je le sais, cette relation là pourrait être tout ce qu'il y a de plus sain. Si je n'étais pas comme je suis. Je rends cette relation à la limite de la toxicité, je complique les choses, par moment c'est a se demander si je ne suis pas manipulatrice. Pourtant, encore une fois j'invoque un dieu auquel je ne crois pas, mais dieu sait que je ne suis pas calculatrice. Et ce soir j'apprends que je dois rester encore trois jours de plus éloignée de mon âme sœur - terme fort, non, pour quelqu'un qui ne croit pas. Bref, on s'en fout, le problème c'est cet attachement destructeur. Et mes réactions. Nous sommes séparés à cause du covid. J'étais positive, je me suis isolée, il a été déclaré cas contact du variant Omicron peu après donc devant respecter un isolement qui dépassait le mien, impliquant une impossibilité de se voir, en résumé et en tout, une semaine. C'est grave. Ah ben ça, c'est très grave. Une semaine. Au secours.
Ça l'est pour moi, qui suis incapable de gérer ce genre de perturbation. Incapable : crises d'angoisse systématiques quand intervient un évènement imprévu dans notre relation qui implique une quelconque séparation. Sensation d'abandon. Colère. Visée d'abord, contre lui, puis prise de conscience de la situation et culpabilisation liée au fait qu'il n'y est pour rien et m'aide comme il peut. Dévalorisation, mais colère encore, tristesse, envie de crever.
Le contexte n'aide pas.
Et ce n'est pas la première fois. Bien que cette relation soit très spéciale dans le sens où l'envie de fonder une famille et de vivre ensemble, du coup, à long terme ensemble s'installe, on peut parler de quelque chose de sérieux.
Mais avant cette personne, il ya eu quelqu'un. Et je l'évince de ma tete et je l'oublie souvent parce que c'est dur aussi de se dire que ça a existé et que ça n'existe plus, mais alors plus du tout, tellement plus du tout qu'on dirait que ça n'a jamais existé. Une personne avec qui j'ai habité pendant un an, qui m'a surement trompée, ou en tous cas est tombé amoureux plusieurs fois ok. Peu importe. Mais toujours cette émotion. Affreusement déchirante, d'être abandonnée. D'une manière ou d'une autre. Personne ne me possède. Dieu merci (encore dieu c'est fatiguant). Mais systématiquement dans une relation je m'offre. Et entre cette personne et mon copain actuel que j'aime profondément, ben y a eu un tas de gens. Et ce tas de gens, à chaque fois, histoire d'un soir ou prise de tête passagère, à chaque fois, cette même sensation. De solitude vertigineuse. Cette peur d'abandon, cette envie de construire même une tout petite tour Lego de rien du tout, un château de sable. Sauf que non en fait. Ça fonctionne pas comme ça. Je sais pas comment ça fonctionne mais en tous cas, pas comme ça. Et donc là, avec ce covid, avec ce variant, avec Noël qui arrive, avec le bordel, ben voilà où on en est. Je me remets à ressentir ça, parce que je suis séparée de mon copain, et ok on devrait être sur une déception commune, dans la mesure. Dans la mesure. Pas dans une réaction disproportionnée (comme me le répètent mère et grand-mère) de ma part.
Donc c'est pas grave. Comme situation. Évidemment. Là tout de suite.
Sauf que ce genre de réaction, là. Disproportionnée comme elles disent. Comme lui dit, bien qu'il soit là pour moi dans ce genre de crise. Ben ce genre de réaction elle veut dire quelque chose et j'en ai marre. Et j'ai pas envie de me justifier non plus. Et je veux pas culpabiliser de me sentir aussi mal pour un évènement aussi dérisoire. Parce que quand je me pose deux secondes cette réaction là elle veut dire quelque chose et ce quelque chose je le refoule à mort depuis des années et évidemment tout le monde s'en fout parce que ça regarde personne d'autre que moi. Et moi j'y arrive pas. À en parler. Du pourquoi du comment. Je me sens pas légitime. Je sais que si je commence à parler je sors la carte du deuil. De mon père qui me manque. Et que si j'ai aussi peur de l'abandon c'est à cause de ça. Mais ça me paraît débile à chaque fois et donc je me tais. Et je dis ok oui c'est disproportionné ok je suis too much haha ok ça marche.
Et j'ai pas de clés en main pour gérer ça. J'ai aucune clé en main pour réussir à réparer ce dysfonctionnement chez moi qui me bouffe mais alors vraiment fort.
Et là on commence à parler (dans les petits congrès introspectifs organisés par mon inconscient) de peur de mourir, omniprésente, de projection de perte absolument quotidienne d'un être cher, etc. Des choses réjouissantes en somme. Donc je continue de me demander si je me trouve pas des excuses, des raisons, des moyens de me sentir mal. Pour légitimer cette sensation.
Ah, et c'est pour ça que ce soir j'écris et que je bois aussi. Je buvais jamais avant toute seule. Ben voilà il est presque 4h du mat et je bois toute seule c'est pour ça que j'ai commencé à écrire sur ce forum. J'en suis à ma 10e bière, un compte rond.
Bref c'était beaucoup de blabla pour dire que ça va pas. Si quelqu'un peut m'aider, ce serait vraiment plaisant. Merci beaucoup de m'avoir lue si c'est le cas.
Très bonne nuit ou journée, c'est selon le soleil quoi.
Clémence