Désespoir face à l'abandon
J'ai besoin de conseils, d'une lecture attentive, j'ai besoin de m'exprimer et d'avoir différents avis sur ma situation.
À ce jour, j'ai 22 ans. Depuis mes 18 ans, soit depuis la découverte et la prise en compte de la part de mes proches de ma santé mentale, je suis suivie par un psychiatre. Il est jeune, il a la trentaine pour info.
Au fil du temps, bien que j'avais d'autres thérapeutes qui m'accompagnaient (psychologues, neuropsychologue, hypnotherapeute...) j'ai développé une dépendance à mon psychiatre. Il ne faut pas être Einstein ou avoir fait des dizaines d'années d'étude pour s'en rendre compte... C'est lui que j'appelais dans les mauvais moments, tout comme lors des bons.
J'ai appris à le connaître lui aussi à travers nos innombrables entretiens. En effet, depuis 2019, hors confinements, je le voyais en moyenne 1 fois toutes les 2 semaines, parfois même toutes les semaines, selon mon état. Par moment il me donnait des détails sur sa vie, rien de très intime évidemment, mais ça me permettait de voir quelle genre de personne il était. Parfois on s'échangeait des musiques ou des podcast à écouter, des films à regarder.
À force de le côtoyer, je savais, je voyais, quand lui même n'était pas en forme, de bonne humeur.
Les 2 premières années de suivi, de mon côté, j'étais en couple avec un garçon depuis plusieurs années, avec qui tout se passait relativement bien.
Au fil du temps, j'ai développé des sentiments amoureux envers mon psychiatre. C'est quelque chose qu'on n'entend pas à tous les coins de rue, quelque chose qui sort de l'ordinaire, mais qui arrive. Je sais qu'il ne s'agit pas d'un transfert, d'un fantasme, ou de je ne sais quoi d'autre. Je sais, je ressens de réels sentiments amoureux envers lui.
Je ne lui en parlais pas au début, par peur du rejet, de l'abandon, qu'il passe la main à un/une collègue.
Mon hypnotherapeute à été la 1ere personne à qui j'ai parlé de ces sentiments. Il insistait à chaque séance pour que je fasses mes aveux à mon psychiatre.
En juin 2021 j'ai craqué, et par téléphone, la gorge serrée, je lui ai dit de façon explicite.
Il m'a répondu que son rôle était de m'être utile, et que si je viens pour le voir lui, et non pas pour la thérapie, ça n'aurait aucun sens. J'ai préféré mentir, par peur du rejet et de l'abandon. Bien sûr que je venais dans un 1er temps pour le voir, et dans un 2e temps pour faire ma thérapie, mais j'avais peur de ne plus pouvoir le voir.
Vous savez, quand on aime quelqu'un, on a envie de côtoyer cette personne. Lorsque cet amour n'est pas réciproque, et ne le deviendra jamais, la raison nous dit d'arrêter, de couper les ponts, mais le cœur, lui, connaît d'avance la douleur que provoquera cette rupture. J'ai écouté mon cœur.
Le temps passait mais les sentiments restaient. Je me suis séparée de mon copain sans lui expliquer en profondeur "pourquoi".
Je lui ai fait à nouveau des aveux en décembre 2021 afin de lui signifier qu'entre temps, j'avais beau avoir eu différentes fréquentations, ça restait toujours lui à la 1ere place. Cette fois ci, il m'a dit que je "n'ai pas besoin de lui faire une énième déclaration". Je l'avais mal pris sur le coup.
Je voyais que discuter de ces sentiments le gênait, semblaient le mettre mal à l'aise. J'avais tellement peur d'être abandonnée par lui, que pendant quasiment 1 an, je ne lui en ai pas reparlé.
En octobre 2022, je me suis relancée et je lui ai à nouveau avoué. À chaque fois il me disait que son rôle était de m'être utile.
Vous savez, durant tout ce temps, j'ai essayé de passer à autre chose. Le voir moins, me forcer à moins lui téléphoner, rencontrer d'autres garçons qui me plaisaient, sortir avec certains d'entre eux. Mais jamais je n'ai aimé l'un de ces messieurs. Je ressentais de l'affection pour eux, et généralement j'étais en mode "love-bombing" dès le début de la relation parce que j'essayais de me convaincre qu'il était possible que j'aime quelqu'un d'autre.
Sauf que ça n'a jamais fonctionné, mon psychiatre restait toujours l'homme à qui je pensais tout le temps.
Maintenant que vous connaissez le contexte, voici le cœur du problème :
Il y a 1 mois, mon psychiatre m'a annoncé qu'en août 2023 il ferait son dernier jour au travail, et qu'en septembre il allait changer de région, déménager.
Le monde s'écroulait pour moi, je ne m'attendais pas à cette annonce, j'étais incapable de parler à ce moment là. Le soir, en rentrant, je lui ai envoyé un long mail pour globalement lui dire, lui rappeler que je ne perds pas seulement mon psychiatre, mais aussi l'homme dont je suis éperdument amoureuse depuis plusieurs années.
Depuis 1 mois, il n'y a pas grand chose à dire. Je ne mange quasiment plus, j'ai perdu 6kg, je ne parle plus, j'annule un a un mes rdv avec mes autres thérapeutes, ne gardant que ceux avec mon psychiatre. Il n'y a qu'à lui que je souhaite parler. Au début, mon psychiatre était plein d'empathie et a décidé de me voir 1x par semaine jusqu'à son dernier jour de boulot.
Quand j'ai commencé à lui parler de suicide, il a perdu patience, et j'observais de l'agacement dans son comportement.
Il faut savoir qu'en 22 ans, j'ai fait énormément de TDS, principalement par IMV pour éviter d'avoir mal en gros. La fois la plus grave, j'ai été dans le coma 5 jours, c'était en 2020. J'ai compris avec le temps que les IMV ne m'aideront pas à partir, cette fois ci je pense "taper plus fort".
Ça faisait un moment pourtant que j'allais beaucoup mieux, ça faisait un moment que je n'avais plus fait de TDS. J'ai un travail qui me plaît depuis février, je parvenais à mieux gérer mes émotions,... Mais cette annonce a tout fait basculer, et je me rends compte que mon psychiatre était mon facteur protecteur... Tout en étant mon facteur destructeur à cause de ces sentiments que je ressens à son égard.
Habituellement, je faisais mes TDS par IMV de façon impulsive. Là, j'ai une date, un tout autre scénario, un lieu. J'ai commencé à écrire des lettres. J'ai posé des congés pour cette période afin que mes collègues puissent s'organiser après que je serai partie.
Bref, j'ai tout prévu.
À l'origine, je ne comptais pas parler de ce "projet" à mon psychiatre, je comptais le laisser en dehors de ça, j'attendais juste le moment où il allait partir pour pouvoir passer à l'acte, parce que je ne voulais pas qu'il culpabilise avec un suicide sur la conscience. Seulement, au cours de nos dernières séances, avec les questions qu'il me posait, j'ai été dans l'obligation de lui en faire part.
Je ne fais pas ce geste seulement, uniquement à cause de lui, à cause de son départ. Je n'ai pas eu une enfance ni une adolescence des plus joyeuses, j'ai pas mal de traumatismes qui m'handicapent, mais ce départ prochain, c'est le seau d'eau qui fait déborder le vase...
Je ne parviens pas à trouver du positif dans ma vie actuelle, même avec un boulot que j'adore, ni dans ma vie future. Je vois noir.
Je suis à bout de souffle. En 22 ans j'ai couru couru et encore couru. Mais là j'en ai assez.
J'ai plus de chances de réussir à me suicider pour de bon, que d'aller mieux. Et même si je parviens à passer au dessus, à aller mieux même après son départ, je sais qu'un jour ou l'autre quelque chose d'autre va me tomber dessus, et ce jour-là, je n'aurai plus mon psychiatre, ma béquille, pour m'aider à tenir en équilibre. J'ai perdu tout espoir, et oui, je me rends compte que malgré lui, il me tenait en vie. J'ai affronté tout un tas d'épreuves, certaines très difficiles, mais parce que je savais que je l'avais lui pour me soutenir.
Il lui reste 2 mois globalement. Idem pour moi.
Je me sens extrêmement mal. Personne de mon entourage ne m'a jamais vu aussi éteinte.
Il est mal lui aussi, j'entends de la colère, de l'inquiétude dans son ton et ses mots. Il exprime le fait de se sentir blessé, et mal, en entendant que lorsqu'il partira, je partirai aussi, mais à ma façon.
Je refuse de le remplacer par un autre thérapeute. Je refuse de tirer un trait sur lui. Je suis dans l'opposition la plus totale à ce niveau là.
J'estime avoir une intelligence émotionnelle, avoir du recul en quelque sorte, et de pouvoir observer mon problème de l'extérieur, comme s'il s'agissait du problème d'une amie à moi. Je vois que je suis opposée à tout, même à tous le monde, et que ça ne m' aidera pas à avancer. Mais je refuse d'avancer sans lui, d'avoir une vie sans lui.
Je ne sais pas exactement ce que vous pourriez me répondre.. J'ai besoin en revanche de poser les maux... Les mots.
M'exprimer. Dire. À l'écrit.
Je vous remercie pour votre lecture, et au temps que vous accorderez à me répondre.