Accompagner une mère face au cancer du sein

Informer, communiquer et partager sur le cancer du sein sont importants pour vaincre cette maladie. Un jeune homme de 25 ans témoigne sur le cancer du sein de sa mère en ce mois rose.

17 OCT. 2016 · Lecture : min.
Accompagner une mère face au cancer du sein

1 femme sur 8 a un risque de développer un cancer du sein, Julien va alors prendre conscience de cette triste réalité, quand à 25 ans il apprend le cancer du sein de sa mère. On ne s'attend jamais à une nouvelle pareille, pourtant il lui a fallu se battre aux côtés de celle qui lui a donné la vie pour l'accompagner dans cette étape difficile. Comment en tant que proche peut-on venir en aide à un parent, un ami, un conjoint ? Voici le parcours de ce jeune homme de l'annonce du cancer à la fin de vie de sa mère. Un témoignage véritable et touchant qui doit nous rappeler que la sensibilisation de l'opinion publique au cancer du sein doit continuer.

Comment avez-vous vécu le cancer de votre mère ?

J'ai appris le cancer du sein de ma mère en même temps qu'elle. Depuis quelques semaines elle se plaignait de son sein (elle ressentait une gêne et avait la sensation d'avoir une boule dans le sein). Après la consultation auprès de son médecin généraliste, ce dernier lui a dit de faire une mammographie.

C'est alors qu'elle m'a demandé de l'accompagner pour les résultats de son analyse. Sans qu'elle me le dise, je voyais bien qu'elle était très stressée et se doutait de la mauvaise nouvelle qui l'attendait. C'est alors que le médecin nous a annoncé qu'elle avait un cancer du sein. Ce fût bien évidemment un gros coup de massue pour nous deux. S'en sont suivis des pleurs dans le bureau du médecin. Ce dernier a très bien réagi en nous disant que c'était un des cancers qui se soignaient le mieux.

Après cette annonce qui nous paraissait comme sortie d'un pire cauchemar, on était tous les deux comme abattu. Arrivé à la maison, on s'est tout de suite rendu sur internet pour en savoir plus sur cette maladie (les différents cancers du sein, les traitements, etc.).

Par la suite ma petite amie est arrivée, nous lui avons annoncé la nouvelle en larmes. Ma mère lui disait de rester près de moi (ma petite amie devait partir à l'étranger pour ses études dans quelques semaines) comme si c'était moi qui devais recevoir du soutien, alors que non, c'était elle qui devait avoir du soutien, pas moi.

Le soir, mon père est rentré, ma mère lui a annoncé la nouvelle. Il faisait comme un "déni" en s'imaginant que ce n'était pas possible, pas réel (c'est là où l'on voit les différents caractères). Puis vient l'annonce à mon frère, mon frère qui est plus réservé s'est tout de suite "refermé" sur lui avec une grande tristesse que l'on voyait en lui.

Finalement quand je vois toutes ses réactions, je me dis que ma mère a été la plus courageuse, car elle se souciait plus de nous, de notre tristesse que d'elle-même. Comme si c'était nous les personnes atteintes d'une maladie. Ma mère a toujours été très courageuse avec un caractère fort, une mère-modèle qui donnait tout pour sa famille. Sa vie passait après la nôtre.

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Diriez-vous qu'il y a des étapes dans le cancer du sein ?

Les différentes étapes face au cancer

Oui il y a plusieurs étapes dans le cancer du sein. Ces étapes durent plus ou moins longtemps suivant les caractères de chacun. Pour ma mère, qui était une femme très intelligente et réfléchie, il n'y a pas eu de phase de refus. Elle a toute de suite compris qu'elle était malade. Il n'y a eu aucun déni de sa part. Elle a surement eu une phase de colère au début, mais vraiment très courte et peu visible. Elle a rapidement accepté cette nouvelle et a tout de suite voulu se battre contre cette maladie pour nous. Elle nous a bien dit que si elle se battait c'était pour nous, pour que nous n'ayons pas de chagrin. Parce qu'elle savait que si elle baissait les bras nous serions malheureux et nous lui en voudrions (même si cela est un peu égoïste de notre part de lui en vouloir, mais nous ne pouvions pas ne pas être égoïste à ce moment-là).

Ma mère s'est battue durant 2 ans et demi avec des hauts et des bas en fonction de l'évolution de sa maladie. Pendant 2 ans et demi elle a eu une vie presque normale (voir "mieux", car elle a tout de suite voulu profiter de la vie au maximum en voyageant le plus possible entre ses traitements).Deux ans et demi plus tard, après une reprise de la maladie plus forte et des traitements qui commençaient à fortement la fatiguer, elle a commencé à baisser les bras car elle savait que cette "rechute" lui serait sûrement fatale. Elle n'avait plus de force physique pour la combattre. De cet épuisement physique en a découlé un épuisement mental. De là une très forte tristesse lui est tombée dessus, accompagnée de crises d'angoisse : la situation lui échappait, ma mère ne pouvait pas accepter cela. Elle qui a toujours tout gérait à la maison, cette situation lui était insupportable. Cette phase de tristesse et d'angoisse a duré de longs mois. Puis après un séjour à l'hôpital, elle a eu d'un seul coup une courte période de joie, tout allait mieux d'un seul coup que ce soit physiquement ou mentalement (je ne saurai expliquer cela). Puis après cette courte période d'espoir, la fatigue est revenue de plus fort d'un seul coup.

L'acceptation de la maladie

À ce moment-là, je crois qu'elle avait compris que c'était sa dernière rechute. C'est à partir de ce moment qu'elle a accepté son sort. Elle l'a accepté bien avant nous. Son seul souhait à présent était qu'on lui donne notre accord pour partir, qu'on accepte qu'elle arrête de combattre cette maladie. Elle désirait qu'on l'accompagne sur ce dernier chemin, en étant heureux pour elle, afin qu'elle puisse partir en paix et se reposer éternellement de cette maladie.

Nous trois, mon père, mon frère et moi, avons réagi différemment : mon père rejetait à tout prix l'idée qu'elle parte, jusqu'au dernier moment il n'y croyait pas, c'était impossible, irréel. Mon frère et moi-même n'étions pas dans le déni. Nous acceptions cette triste réalité et pour ma part, même si j'étais très triste, je lui faisais comprendre (à ma mère) que si c'était son choix, je l'acceptais en lui suggérant toujours de faire un petit effort encore pour se battre (l'égoïsme est à son paroxysme dans ces moments-là, on veut qu'elle reste pour nous, on oublie à quel point elle souffre et que la mort est la seule échappatoire pour souffler).

Ma mère est restée à l'hôpital durant quelques semaines et nous voyions de jour en jour son état s'empirer. La fatigue devenait de plus en plus forte, jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus nous parler. Ces derniers moments étaient horribles pour elle, même si j'espère que les médecins mettaient des tranquillisants ou autres anti-douleurs pour qu'elle ne souffre pas psychologiquement. Bien entendu, ces semaines d'hôpital étaient très dures pour nous aussi. Comme elle, nous étions impuissants.

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Les derniers jours

Puis quelques jours plus tard, vient l'annonce des médecins pour nous informer que c'était les derniers instants de vie de ma mère. Même si on s'y attendait grandement, ce fût encore un coup de massue pour nous trois. Peut-être encore plus pour notre père qui a toujours eu du mal à accepter la vérité. Ce coup de massue fut très bref, ma mère est partie quelques heures après cette annonce. Heureusement, nous étions là pour son dernier souffle, ce fut dur mais à la fois on était comme "heureux" d'être là avec elle jusqu'à son départ. Et mon père lui a finalement fait son plus beau "cadeau" juste avant son départ : il lui avait fait comprendre qu'elle pouvait partir et qu'il l'acceptait.

Les moments après le décès

Après son décès, nous avons était abattus. Mais cela n'a bizarrement pas duré très longtemps (quelques dizaines de minutes). Nous étions en fait sûrement "soulagés" pour ma mère. Les derniers jours étaient très épuisants pour elle et j'étais pour ma part comme heureux qu'elle se libère de cette souffrance (mon égoïsme m'avait quitté à ce moment). Ce soir-là (ma mère est décédée dans la nuit), c'est comme si mon cœur avait pris le dessus sur mon cerveau. Mon cerveau me disait d'être triste mais mon cœur m'ordonnait d'être heureux pour elle, enfin elle se reposait et était en paix. C'est un sentiment très bizarre et perturbant à la fois (mais pourquoi je ne suis pas aussi triste que je ne l'aurais pensé ? Ce n'est pas humain ?).

La nuit du décès j'ai contre tout attente très bien dormi, je n'ai pas cogité dans mon lit. J'étais surement très fatigué et aussi sous l'effet de ce drôle de sentiment de soulagement pour elle.

Les jours qui ont suivi son décès étaient de plus en plus dur. Je ne me rendais compte qu'au fur et à mesure que ma mère ne reviendrait plus jamais. Plus jamais je ne pourrais lui parler, la toucher, lui faire des câlins... C'est là que c'est très dur. Je me forçais à penser que là où elle était, elle était heureuse (mais cela est dur à imaginer quand on est athée, je comprends ceux qui se réfugient dans la religion après des événements pareils. Mais la religion ne sera jamais mon opium).

Puis petit à petit cette tristesse s'estompe, même si cela prend beaucoup de temps. Pour ma part, je pense que le deuil a été le plus rapide parmi les proches de ma mère, non pas que je suis un surhomme ou un homme sans sentiment mais parce que j'avais accepté depuis longtemps cette maladie et m'étais préparé à cela.

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Que conseillez-vous aux proches des personnes ayant un cancer qui sont dans le même cas que vous ?

Il faut juste accompagner la personne ayant un cancer : accepter ses choix, ne pas être égoïste, penser à elle avant de penser à soi-même , même si cela est très difficile. Il faut bien imaginer que cela est toujours moins dur pour nous que pour la personne.

Si on voit que la personne a encore des ressources et qu'elle baisse les bras, il faut la remotiver. Mais si l'on voit que la fatigue est trop importante et que la maladie l'emportera quoi qu'il arrive, il faut soutenir la personne atteinte de la maladie en acceptant son choix de partir. C'est le plus beau cadeau qu'on puisse lui faire.

Comme julien, n'hésitez pas à partager vos impressions, vos ressentis sur cette épreuve en commentant l'article.

Auteur : Témoignage anonyme

Photos : Shutterstock

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