La dépression, un réveil douloureux

Le passage de l’état d’anesthésie à l’état de réveil de la douleur.

26 NOV. 2018 · Lecture : min.
La dépression, un réveil douloureux

Premier acte : le choc fatal

Premier acte, c'est le choc fatal, le coup de trop qui m'achève.

J'ai été projetée en une simple fraction de seconde dans le néant. 

Le traître a voulu que je meure. Mais je résiste. Je ne veux pas tout laisser derrière moi. Je résiste. Je ne me sens pas prête à tout abandonner. Je résiste, je ne veux pas mourir à hier. Je résiste, mais le coup de poignard en plein coeur me fait tomber.

Mon corps n'est plus qu'un amas de sang. Je traîne ma carcasse. Un vaste désert s'offre à moi à perte de vue. Je refuse de souffrir. Je résiste en m'anesthésiant à l'endroit même où j'ai été poignardée.

Le traître n'a pas eu le courage de me dire en face ce qu'il attendait de moi. Non, il a préféré me poignarder en plein coeur pour ne pas avoir à s'ouvrir à son intériorité. J'aurais pu l'écouter, mais l'idée d'un jugement de ma part lui était insupportable. 

Alors, un coup de poignard en plein coeur lui était plus efficace. 

Oui, son coup a été traître mais d'une grande efficacité, il m'a projeté dans la réalité froide et amère du silence. 

Deuxième acte : le moment le plus douloureux

Deuxième acte, c'est le moment le plus douloureux. Tous mes sens me ramènent au coeur. La blessure se réveille. Je suis une bête ensanglantée qui se traîne dans un désert sec et aride.

Je me vide de mon sang et de sens. Je veux mourir. Ne plus souffrir.

La douleur est trop intense. Achevez-moi, qu'on en finisse !

Je préférais mon état premier provoqué par le coup de poignard, je ne ressentais rien, j'étais juste choquée, hébétée, assommée. 

Maintenant, la blessure se réveille et elle me torture.

Je suis attirée par la gravité. Tout me semble grave, je suis lourde. Je suis à terre.

blanc.jpg

Mes jambes ont flanché. Pourtant, je continue de résister. Je me traîne dans ce désert sec et aride, vidée de mon sang et de sens. Plus je résiste et plus mon corps se ratatine. La traversée du désert finira par me réduire en poussière. Le traître fête sa prochaine victoire de destruction. 

Cela s'appelle la dépression.  La dépression, c'est la prise de conscience de mon jeu de démolition. Je résiste. Je refuse de lâcher mon ennemi alors que je n'ai qu'à appeler à l'aide mais non, je continue à jouer mon rôle qui m'enrôle dans une armée impitoyable qui m'entraîne vers ma propre destruction.

Je me suis programmée à crever comme un chien dans ce désert.  Je n'ai pas le courage de changer les règles du jeu. 

La dépression, c'est la poursuite de mon oeuvre de destruction mais avec la douleur de vivre en supplément.  Avant, je ne ressentais rien. J'étais dans un profond coma. Là, je ressens tout, c'est insupportable, achevez-moi, qu'attendez-vous !

Dernier acte : je laisse tout derrière moi

Je choisis de tout laisser derrière moi, de tout abandonner.

Donner ce que je ne veux plus telles que les obligations, les contraintes, les responsabilités, la pression, la culpabilité, les reproches, les plaintes, le silence, le rejet, la douleur, le passé gâché.

Être juste là et faire confiance. Cessez de me débattre. Laissez la vie me guider jusqu'à la prochaine oasis. Il suffit juste de faire confiance.  Je peux laisser ma vieille peau, faire peau neuve et jouer un rôle plus léger.  Oui m'alléger le plus possible. Sortir de la dépression.  Cesser de me mettre la pression. Cesser de me débattre. Ne plus bouger.

Laisser la vie pleurer en moi pour que les larmes me soulagent. Baisser les armes. Vivre au lieu de survivre. Demander au lieu de me taire. Demander au lieu de résister. Je demande à la vie de me guider. Je demande et je reçois ce dont j'ai besoin pour m'apaiser. 

gris.jpg

Plus de pression ni de dépression. C'est le réveil de mon jour de gloire. C'est ma plus grande victoire. Je bois l'eau de l'oasis. C'est la fin de la traversée du désert. J'ai gagné, je suis alignée, droite et légère.Tout m'apparaît plus coloré et sucré. 

Je savoure ma vie nouvelle sacrément belle. J'en ai fini avec la dépression.  La gravité s'en est allée.  Sublime échappée ! Je suis sauvée. 

Ma blessure est guérie, aujourd'hui, je ne souffre plus. C'est un doux réveil. J'ai cessé de résister. J'ai quitté ma vieille peau. Je suis morte à hier pour m'abreuver à ma nouvelle oasis. Ma re-naissance.

Important :

Pour sortir de la dépression, il est souvent utile d’être accompagné(e) par un professionnel. La dépression, c’est un difficile réveil qui demande un long cheminement pour se reconnecter au meilleur de soi, ce lieu où il est si bon d’être pleinement soi. La dépression, c’est sortir de son état de victime et de guérison pour aller vers la responsabilisation de soi.

Laurence Traineau, « la dépression, un réveil douloureux », «Ma re-naissance, mon oasis », 20 juillet 2018.  

Photos : Unsplash

PUBLICITÉ

Écrit par

Laurence Traineau

Laurence Traineau, Praticienne clinicienne en Psychologie clinique et Psychothérapie certifiée à l'EPC (École de Psychologie Clinique à Aix en Provence). Sexothérapeute / Sexologie et Santé sexuelle /Formatrice /Ateliers de groupe sur l'affirmation de soi /Animatrice /Café-Débat /Conférencière Auteur “Réveille-moi, c'est bon d'être fou!” /Éducatrice Sportive.

Voir profil
Laissez un commentaire

PUBLICITÉ

Commentaires 2
  • Steph

    C’est exactement ce que je ressens un grand coup qui m’a achevée

  • Oumoussochocolat

    Ce texte m'a beaucoup touché. Dernièrement je prend conscience de cette fameuse renaissance, et c'est tellement bon de ressentir la vie et de ne pas la souffrir ! Joli texte

derniers articles sur dépression

PUBLICITÉ