L'enfant unique, comment l'élever ?

Égoïste, fragile, couvé... Voici quelques uns des lieux communs qui circulent à propos des enfants uniques. Sont-ils vrais ? D'où viennent-ils ?

16 MAI 2018 · Lecture : min.
L'enfant unique, comment l'élever ?

Lorsqu'un enfant ou adulte est égoïste ou caractériel, on entend souvent la justification de son enfance en tant qu'enfant unique. Mais l'enfant unique est-il nécessairement égoïste ?

Les enfants uniques ont souvent mauvaise réputation : présumés égoïstes, asociaux, immatures, capricieux et gâtés, ils n'ont pas le droit à l'erreur, car le moindre de leurs défauts sera rejeté sur cette situation, comme si être enfant unique expliquait tout, et n'avait que des inconvénients dans la construction psychologique de l'enfant et de l'adulte à venir. Mais qu'en est-il vraiment ? Les enfants uniques sont-ils si différents des enfants issus de fratries ?

Égoïste, vraiment ?

Si les enfants uniques ont une situation difficile et sont parfois mal considérés au sein de la société, c'est à cause des reliquats de la Seconde Guerre Mondiale. Dans les années 50, le pays doit être repeuplé. Le philosophe Daniel Gayet indique que ce besoin était si fort que le gouvernement, via différents supports, n'hésitait pas à laisser penser aux jeunes parents que, pour que leur enfant soit équilibré et en bonne santé mentalement, ils devaient obligatoirement en avoir au moins un autre.

Même Françoise Dolto, pourtant la première à reconnaître à l'enfant une psychologie construite et à part, y va de son jugement moral en déclarant que les enfants uniques sont "hyperverbaux et hypersensoriels" quand ils grandissent, que ce sont des adolescents extrêmement bons à l'école mais qu'ils ne comprennent pas les interactions sociales.

C'est dans les années 70 que l'on se rend compte que les connaissances que l'on a de l'enfant unique sont basées sur des jugements moraux et non scientifiques, et que les disciplines psychologiques s'y intéressent réellement.

L'attitude des parents : clé dans le développement de l'enfant

L'enfant unique dispose de l'amour de ses parents pour lui seul. Et si c'est un avantage extrême et un bouclier immense de bénéficier de tant d'amour, les parents doivent être attentifs à ne pas tomber dans la surprotection de leur enfant. Cette surprotection bénéficiera en effet à l'enfant dans le cercle familial, mais il pourra hésiter à se lancer hors du cercle, en ayant peur de l'échec ou de n'être pas à sa place. Ce type de comportement pourrait poser problème à l'adulte qu'il deviendra, qui n'oserait pas aller au-devant de ses envies de peur de ne pas être légitime.

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Certains parents sont aussi très exigeants avec un enfant unique, contrôlant ses moindres faits et gestes et étant très tatillons pour tout ce qui concerne l'école, les loisirs ou les amis. Même si cela part d'une bonne intention, les parents qui auront cette tendance devront faire attention de ne pas étouffer leur enfant et de ne pas lui apposer trop d'exigences, afin qu'il puisse se construire ses propres expériences.

Unique et solitaire ?

Être le seul objet d'amour de ses parents n'empêche pas de vivre des moments d'ennui et de profonde solitude. Au contact permanent de ses parents, l'enfant peut grandir trop vite et adopter une maturité qui n'est pas de son âge. Même s'il est le seul enfant de la maison, les parents doivent être attentifs à ne pas faire peser sur lui leurs problèmes d'adultes (financiers, professionnels ou sentimentaux), qu'il n'a pas à gérer.

Le lien construit avec l'enfant est encore plus exclusif s'il ne vit qu'avec un des deux parents. Le parent devra être vigilant à ne pas faire peser ses angoisses et à ne pas voir en l'enfant un reflet de lui-même, afin qu'il puisse s'épanouir en tant que personne autonome sans être polluée par l'anxiété et les conflits non résolus du parent, qui ne font pas partie de son histoire.

Et si avoir des frères et soeurs apprend la vie en société, la frustration, le fait de composer avec les autres, l'enfant unique pourra cependant trouver tout cela chez des amis ou des cousins, pour peu que la famille ait un cercle social actif et sache ouvrir l'enfant vers l'extérieur. Ceci étant, comme chez tout enfant, le principal est de respecter ses envies et besoins, qu'il préfère les activités calmes et tournées vers l'introspection ou les activités plus énergiques qui le confrontent aux autres.

Le cas des familles recomposées

Un enfant unique peut avoir du mal à accepter une nouvelle famille, un beau-père ou une belle-mère ainsi que des demi frères et soeurs. Et c'est bien normal : outre le fait que la recomposition familiale soit un énorme bouleversement pour tout enfant, l'enfant unique découvre soudainement ce que cela fait d'avoir une fratrie, parfois à un âge où les enfants ne sont pas tendres les uns envers les autres, et doit partager son parent, ce qu'il n'a jamais fait.

Il est crucial de bien préparer l'enfant à des bouleversements familiaux de ce type, et de bien penser à dégager du temps que l'on passera juste avec lui, pour lui montrer que l'amour que l'on a pour lui est toujours aussi vif. Si vous sentez que cette situation cause trop de mal-être à votre enfant, n'hésitez pas à en discuter avec lui, et éventuellement à voir ensemble un psychologue ou thérapeute familial.

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L'enfant unique, un enfant à part ?

Oui, comme tout enfant ! L'enfant unique vit dans un climat particulier, c'est vrai, car il est le seul sujet d'amour de ses parents, le centre d'attention du noyau familial. Mais comme pour tout enfant, c'est en grande partie son éducation qui fera de lui ce qu'il deviendra plus tard, c'est pourquoi les conseils traités ici peuvent s'appliquer à tous les parents. Un enfant unique n'est donc pas nécessairement égoïste, et s'il l'est, c'est probablement l'éducation qui lui a été apportée qui aura mis en avant chez lui ce trait particulier, trait qui pourra toujours se corriger par un travail sur soi-même. Mais réfléchissons un moment : ne connaissons-nous pas tous des personnes issues de fratries qui sont tout aussi égoïstes ?

Il est temps de briser les clichés à propos des enfants uniques, et de faire comprendre à leurs camarades ou à leurs collègues, car c'est quelque chose qui les poursuit même à l'âge adulte, qu'être enfant unique n'est pas une tare. Nous avons tous des qualités et des défauts, mais il est faux de penser que ces défauts sont uniquement imputables au fait d'être un enfant unique.

Photos : Shutterstock

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