Nous ne devons pas utiliser à la légère les noms des troubles mentaux
Au quotidien, nous utilisons un langage pour parler de ces troubles qui invisibilisent ou ne respectent pas les droits de ceux qui en souffrent.
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Les troubles mentaux seront la principale cause des arrêts de travail dans le monde en 2030, selon l'Organisation Mondiale de la Santé. La dépression, elle, sera la première cause de morbidité.
Et pourtant, nous utilisons chaque jour à la légère les noms de ces maladies : "je suis un peu déprimé(e) aujourd'hui", "je suis vraiment bipolaire"... Au quotidien, ces termes cliniques nous servent à définir des situations somme toute assez banales, en les chargeant d'une forte connotation négative.
"Les personnes souffrant de maladie mentale [...] doivent faire face à leur trouble et au stigma social", Julio Bobes, Président de la Société Espagnole de Psychiatrie.
En France, on estime qu'environ un quart des recours au soin (y compris généralistes) sont pour des troubles dépressifs, et que 1,6 million de personnes sont atteintes de troubles bipolaires. Pourtant, les pathologies mentales sont encore peu connues et souffrent de nombreuses idées reçues. Beaucoup de personnes pensent encore qu'un problème de santé mentale est une faiblesse ou de la faute de la personne qui en souffre, et qu'il suffit d'un peu de volonté pour s'en sortir.
Nous ne devons pas utiliser à la légère les noms des troubles mentaux, dont l'usage polysémique ne donne pas de précision sur ce que l'on veut dire et ajoute du stigma à ceux qui en souffrent.
Dire de quelqu'un qu'il a des TOC parce qu'il est tatillon
Les personnes souffrant de Troubles Obsessionnels Compulsifs ne sont pas simplement très ordonnées. Selon Amparo Belloch, Professeure de Psychopathologie à l'Université de Valence :
"Leur préoccupation excessive pour le perfectionnisme et le contrôle mental et interpersonnel empêche le développement d'autres traits comme la flexibilité et l'ouverture à de nouvelles expériences et complique ou empêche l'efficacité".
Ce type de trouble peut réellement handicaper le quotidien et empêcher les personnes de mener à bien leur travail, leurs loisirs et leurs relations sociales. Selon le Manuel Diagnotique des Troubles Mentaux (DMS), les TOC affectent environ 1% de la population.
Parler de "dépression" quand on veut parler de tristesse
Nous utilisons bien trop souvent ce terme pour nous référer à des frustrations quotidiennes. Ce faisant, nous faisons passer l'idée que la dépression peut naître de la frustration ou de la tristesse face à des choses importantes.
"En utilisant ce terme à la légère, on a des a prioris sur les personnes qui ont un trouble dépressif car on pense que c'est une excuse pour prendre des congés", Julio Bobes.
Selon la Fondation FondaMental, la dépression est une maladie psychiatrique qui touche plus de 300 millions de personnes dans le monde. Dans 15 à 30% des cas, la dépression est dite "résistante", c'est-à-dire que les traitements thérapeutiques standards sont inefficaces. La dépression a un impact immense sur la qualité de vie, le travail, la vie de famille et la vie sociale.
Appeller quelqu'un "schizophrène" parce qu'il est étrange ou a un comportement incontrôlable
La schizophrénie est, selon l'OMS, "un trouble mental grave qui affecte près de 21 millions de personnes dans le monde. Les psychoses, dont la schizophrénie, se caractérisent par des anomalies dans la pensée, la perception, les émotions, le langage, la perception du moi et le comportement [...] pouvant compliquer le travail ou les études de la personne".
La stigmatisation et la discrimination des personnes souffrant de schizophrénie peuvent se voir au quotidien, par exemple dans le manque d'accès aux services socio-sanitaires. On peut aussi se trouver face à un non respect des droits de la personne, par exemple via un internement prolongé en hôpital psychiatrique.
"Dans près de 6 articles de presse généralistes sur 10, le terme "schizophrénie" est employé pour désigner tout autre chose que la pathologie", Fondation FondaMental
Dire de quelqu'un d'excentrique ou différent qu'il est "antisocial"
On appelle souvent "antisociale" une personne qui ne partage pas les mêmes centres d'intérêt que les autres ou préfère sa propre compagnie à celle des autres. En réalité, une personne souffrant de trouble antisocial a des "comportement criminels", reflète un "manque de considération, de préoccupation et une violation des droits des autres" (Amparo Belloch). Les caractéristiques de cette maladie provoquent en général son échec dans des rôles de responsabilité (en tant que parent, par exemple) ou de certaines qualités, comme l'honnêteté. La prévalence de ce trouble est de 3% chez les hommes et 1% chez les femmes.
Utiliser "bipolaire" pour décrire quelqu'un qui change facilement d'avis
En France, on estime que 1,6 millions de personnes sont atteintes de trouble bipolaire. Il s'agit d'une maladie mentale grave, associée à des déficits cognitifs même en dehors des épisodes aigüs, et auparavant connue sous le nom de "trouble maniaco-dépressif. Les personnes souffrent de périodes cycliques d'excitabilité (ou "manie"), suivies de phases de dépression. Celles et ceux qui souffrent de trouble bipolaire ont un fort risque de suicide.
Parler "d'anxiété" plutôt que de nervosité ou d'impatience
On estime que 21% des personnes présenteront un trouble anxieux à un moment où à un autre de leur vie (source : Anxiété.fr). C'est un sentiment d'appréhension et de peur, une préoccupation incontrôlable et excessive sur un grand nombre d'évènements ou d'activités (comme le rendement professionnel ou scolaire) qui se prolonge plus de six mois.
Lorsque la source de cette angoisse n'est pas connue, elle est d'autant plus forte. L'anxiété s'accompagne en général d'au moins trois symptômes physiques :
- Irritabilité, inquiétude ou impatience
- Difficultés à se concentrer ou à se vider la tête
- Fatigabilité facile
- Tension musculaire
- Difficultés à s'endormir ou à rester endormi(e)
- Sensation de fatigue au réveil.
Dire de quelqu'un dans son monde qu'il est "autiste"
Les enfants autistes font face à de nombreux problèmes d'adaptation et de développement :
- Altération des comportements non-verbaux, comme maintenir le contact visuel
- Difficulté ou incapacité à développer des relations sociales
- Retard ou absence totale de développement du langage oral
- Schémas comportementaux, d'intérêts et d'activités restreint ou répétitifs
En plus de le vivre chaque jour, les enfants et adultes autistes font face à une incompréhension de la population, à l'inexistence d'une méthode générale de traitement ou à la difficulté d'un suivi et d'un soutien quotidien (ex : difficulté pour les enfants d'obtenir ou de conserver une aide d'AVS).
Dire que l'on va se suicider quand on en a assez
On dit très facilement "je vais me tirer une balle", "je vais me pendre" ou encore "je vais me jeter par la fenêtre" lorsqu'on veut simplement dire qu'on en a assez de quelque chose, qu'on est énervé et frustré par une situation.
En 2011, plus de 11 000 personnes se sont données la mort en France métropolitaine, faisant du suicide une cause majeure de décès prématuré (source : Fondation FondaMental).
Selon l'OMS, le suicide fait un mort toutes les 40 secondes.
"Il est crucial d'en finir avec les mythes et idées erronnées sur ce problèmes pour facilter la déstigmatisation et la culpabilisation des comportements suicidaires [dire par exemple qu'une tentative de suicide est un appel à l'attention], et ainsi que les personnes ayant des pensées suicidaires demandent de l'aide", précise Nel A. González Zapico, Président de la Confédération de la Santé Mentale en Espagne.
Photos : Shutterstock
Prendre soin de soi est important. Si vous vivez un trouble psychologique, n'hésitez pas à prendre contact avec un(e) professionnel(le).
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Bonjour, a qui s adresse cet article ? Parler de "dépression grave", quand il s agit de "démence"...(non diagnostiquée) Ca c est la signature des psychiatres... Parler d "Œdipe inverse", quand il s agit de "conflit de loyauté"... Parler de "fragilité", quand il de "harcèlement".... Ca c est la signature des psychologues...