Quand son enfant refuse de manger : analyse et conseils

« Ouvre la bouche! »« Tu ne sors pas de table tant que tu n'as pas terminé ton assiette! »« Une cuillère pour maman... pour papa... pour le voisin... »Et voilà... les dégâts commencent.... Des dégâts qui laisseront des traces dans votre vie d'adulte.

Des traces dans votre rapport à votre corps... aux autres... Alors pour ces 40 jours d'articles quotidiens, je m'intéresse à votre bouche... votre corps... les mots des parents... les attentes... demandes d'amour... de reconnaissance des parents... de vérification de leur place... et votre rapport à la nourriture... 40 jours... une centaine de repas pris chaque jour chez vous... seul, en couple ou en famille. Or souvent, dans les familles, le repas peut vite se transformer en bras de fer, voire en tentative de gavage... Il est donc pleins d'enjeux ce moment ! Ce moment qui devrait être avant tout un moment de plaisir... de partage...

Jusqu'au jour où votre enfant de 18 mois... deux ans... et peut-être même dès bébé... ferme sa bouche fermement, tourne la tête et d'un air décidé, vous faire comprendre : « non, non... je ne vais pas mettre cette cuillère de purée dans ma bouche... »Ouh lala.... qu'est-ce que votre enfant est en train de faire ? Et vous vous dites :« Ça y est, il ne m'écoute déjà plus... » « Qu'est-ce qui lui prend ? »« Comment vais-je faire ? »...

Pourtant, jusqu'à présent, il avalait à toute vitesse son biberon... il ouvrait grand la bouche et demandait même à accélérer la vitesse des cuillères...Bref, vous étiez rassurée, heureuse, comblée... Pourquoi ? « Mon bébé mange bien »... D'ailleurs, les deux choses qu'on demande aux parents quand ils parlent de leur enfant est :« Il dort bien? Il mange bien? »Et que veut dire bien manger ?C'est manger en grande quantité ? C'est manger tout ce qu'on lui présente dans la cuillère ? Dans son assiette ? Sans qu'il n'émette aucune opposition ?

« Manger bien » serait donc représentatif d'une bouche qui s'ouvre quand une cuillère s'approche et qui se ferme quand le bol est vide. Qu'en pensez-vous ? Et figurez-vous que l'enfant, très attentif qu'il est... très sensible à chacune de vos réactions, l'a bien compris lui... qu'il y avait peut-être un problème, à ouvrir et fermer sa bouche ainsi comme une petite machine... comme un objet...

La différence entre enfant-sujet et enfant-objet

Et oui, je reviens toujours à cette distinction fondamentale entre l'enfant-sujet et l'enfant-objet. L'enfant objet serait donc cet être... pour ceux qui n'ont pas lu tous mes écrits... qui exécute toutes les demandes des parents, sans jamais s'opposer. Un être qui donne juste de l'amour et des sourires à ses parents. Un être qui se lève quand on lui demande et qui se couche sans discuter quand on lui dit. Un être qui vient vous faire un câlin quand vous en avez envie et qui vous laisse tranquille quand ce n'est pas votre moment.Un être qui vous montre, quand vous en avez besoin pour vous rassurer : que vous êtes indispensable à sa vie, qu'il vous aime, qu'il ne peut pas vivre sans vous mais qui sait aussi jouer seul et est très autonome quand vous souhaitez être tranquille.

Je pourrais développer ainsi à l'infini des situations que vous devez rencontrer chaque jour avec le désir profond qu'il vous obéisse, même quand vous ne savez pas énoncer la limite, parce qu'il saurait aussi exécuter ce qui n'est pas dit et faire abstraction de toutes vos contradictions et fluctuations. Un enfant sage comme une image ! Un enfant surtout qui n'EST pas. Un enfant qui n'aurait pas de désir propre parce qu'il ne serait pas autorisé à en avoir. Un enfant qui n'aurait pas d'ailleurs. Un enfant qui aurait un corps mais ce corps appartiendrait au parent. Et voilà, ce qui nous ramène alors à la cuisine ! L'enfant qui tout à coup refuse de manger vient vérifier une chose : « est-ce que son corps lui appartient ? Donc est-ce qu'il existe lui ? Est-ce qu'il est ? » ou « est-ce que son corps vous appartient à vous? »Est-ce que vous contrôlez tout ce qui entre et sort de ce corps: La nourriture et les selles ?Ou peut-il s'en saisir lui parce que ce corps sera le sien... qu'il en aura compris le fonctionnement... et qu'il saura s'en occuper.

En effet, pourquoi devons-nous tous manger ? Est-ce pour permettre à notre corps de fonctionner, de fabriquer des cellules... ou est-ce pour faire plaisir à la mère nourricière ? Celle qui donne à manger. Pour lui prouver son amour. Car lorsque vous dites : « une cuillère pour maman... une cuillère pour mamie... », qu'est-il dit à l'enfant ? Il lui est dit qu'il ne mange pas du tout pour lui.

La place de vos angoisses

Ensuite, se pose la question de vos angoisses. La nourriture sert en effet à faire fonctionner cette incroyable machine qu'est le corps, donc que se passe-t-il si votre enfant refuse de manger. Et là, votre angoisse prend toute la place.Vous n'arrivez plus à le voir, bien portant qu'il est.Vous l'imaginez déjà en train de se laisser mourir. Alors n'ayez crainte ! Rares sont les enfants qui se laissent mourir ! L'anorexie chez l'enfant est extrêmement rare. Regardez le ! Vous semble-t-il aller mal ? Non, non... aujourd'hui l'enjeu est ailleurs... mais demain... si vous le forcez... il est possible qu'il refuse totalement de manger.

L'enjeu est de savoir qui décide pour lui. À-t-il le droit d'exister ? Et surtout, êtes-vous cohérent avec votre discours lui expliquant qu'il est une personne. Si c'est le cas, lorsqu'il vous signifie qu'il ne veut pas manger, entendez le. Si il perçoit que cela ne vous met pas en péril parce que vous vous sentiriez rejeter... angoissée.. dans une volonté de contrôle sur lui et tout ce que j'ai énoncé précédemment... il ne restera pas dans cette posture d'opposition.En revanche, si vous insistez, le forcez, faites du chantage pour le faire manger... alors il se fermera totalement... pour sa survie psychique... existentielle. L'entendez-vous ? Entendez-vous maintenant à quel point le forcer revient à l'annuler ? À vouloir le maîtriser comme une poupée ? Et si votre enfant ne s'oppose pas alors qu'il n'aime pas ce qu'il mange... alors qu'il a esquissé une tentative... c'est peut-être qu'il a peur.lou que sa mission est de vous faire plaisir avant toute chose. Souhaitez-vous que votre enfant s'exécute parce qu'il a peur de vous ou parce qu'il s'oublie pour vous ? Qu'en est-il alors de son existence propre ? Qu'en est-il alors du sens qu'il doit donner au monde et à son fonctionnement ? Enfin, à chaque fois que vous préparez à manger, demandez-vous tout de même si le repas lui plait.

Ce n'est pas parce que ce sont des enfants qu'ils doivent manger tout ce qui leur est présenté. Vous voudriez qu'on vous force à manger un aliment que vous n'aimez pas ? C'est tout de même étonnant de penser qu'un enfant peut manger un aliment qu'il déteste, voire le dégoûte, alors que vous ne le feriez sans doute pas pour vous. Et puis, ensuite, si vous lui demandez, l'obligez systématiquement, à terminer son assiette, cela signifie que vous intervenez, vous, sur sa sensation de satiété alors qu'il vous dit qu'il n'a plus faim. Quel pouvoir avez-vous alors ! Vous êtes dans son ventre ? Vous savez mieux que lui si il a encore faim ou si il est repu ?

Toutes ces interventions du parent concourent à faire naître chez votre enfant, un rapport compliqué à la nourriture. Manger ne sera pas seulement un besoin pour son corps et un plaisir... Manger sera lié aux mots de l'adulte, aux restrictions, aux insistances, au forçage, etc....Tout ce qui entrera alors dans son corps pourra le mettre en danger. En danger de disparaître... ne pas exister... derrière cette acceptation d'une bouche qui s'ouvre et ferait entrer l'autre dans son corps pour le contrôler totalement. Cette peur d'intrusion s'étendra alors à sa relation à son corps et à l'autre en général... jusqu'à la sexualité parfois. Alors STOP. Libérez le de tout cela ! Permettez lui de mettre du sens dans chaque action de sa vie ! Permettez lui d'exister ! En le laissant tout d'abord libre de gérer son ventre et son assiette.

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