La pilule rend-elle dépressive ?

L'un des effets secondaires de la pilule pourrait-il être la dépression ? Même si le lien entre les deux est flou, il est dorénavant certain qu'elle influe sur le bien-être.

22 SEPT. 2017 · Lecture : min.
La pilule rend-elle dépressive ?

On sait depuis maintenant un moment que les hormones de synthèse prises par les femmes peuvent avoir des effets secondaires néfastes, notamment au niveau psychologique. Même si nous ne savons pas encore quel mécanisme biologique mis en place avec la contraception hormonale peut influer sur la santé psychologique, de nombreuses femmes pointent du doigt un mal-être déclenché par la prise de la pilule.

L'accès à la pilule en France est très facilité, elle peut être prescrite comme moyen de contraception en tant que tel, mais aussi pour d'autres besoins, tels que l'acné, des règles douloureuses, des kystes, etc. Selon une étude réalisée en 2013, seules 3% des femmes en âge de procréer n'utilisaient pas de moyen de contraception (étude Inserm et Ined), et 50% d'entre elles prenaient la pilule en 2010 (contre 25% aux États-Unis). Pourtant, depuis 2010, on observe une baisse de la prise de la pilule (50% en 2010, 41% en 2013).

En cause ? Une image de plus en plus négative de la pilule, notamment après les scandales des pilules de 3e et 4e génération, par exemple. Si, pour les générations précédentes, les moyens de contraception étaient un enjeu fort au niveau social et politique, un levier vers la libération sexuelle, la génération actuelle prend bien plus en compte les aspects négatifs et les répercussions sur la santé que peut avoir un tel moyen de contraception, se tournant de plus en plus vers d'autres moyens (anneau, stérilet, préservatif, patch...). Maintenant que ce droit pour gérer soi-même sa vie sexuelle et sa fécondité est acquis, la génération de femmes qui utilise des moyens de contraception souhaite placer son bien-être et sa santé avant tout.

Pilule et dépression : des faits avérés ?

Les femmes sont de plus en plus nombreuses à décider d'arrêter la pilule au profit d'un autre moyen de contraception, et à noter un mieux-être certain depuis qu'elles ont arrêté la pilule. Même si aucune étude n'a permis de mettre en relation les mécanismes biologiques de la pilule qui influeraient sur l'état psychologique, il est certain que les hormones de synthèse ont certains effets secondaires sur le bien-être.

Une étude de l'Université de Copenhague, terminée en 2016 mais menée entre 2000 et 2013, a suivi plus d'un million de femmes de 15 à 34 ans, se focalisant sur leur utilisation de contraception hormonale et d'anti-dépresseurs en excluant les femmes déjà sous anti-dépresseurs avant 2000. D'après cette étude, les femmes qui prennent une contraception hormonale ont 40% de risque en plus de prendre des anti-dépresseurs. Chez les adolescentes (15 à 19 ans), le risque monte à 80%.

L'étude ne démontre pas que la pilule est en soi responsable de la dépression, mais note une corrélation entre la prise d'une contraception et celle d'anti-dépresseurs. En outre, il faut rappeler que la pilule peut parfois accroître une fragilité psychologique ou émotionnelle, d'où le risque plus élevé de prise d'anti-dépresseurs.

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Ellen Wiebe, gynécologue et chercheuse à l'Université de Colombie-Britannique (Vancouver), précise aussi que, outre l'instabilité émotionnelle, la pilule peut aussi avoir des effets aggravants sur le désir sexuel.

Au niveau du ressenti personnel, il est compliqué de connaître avec exactitude les effets que peut avoir la pilule. En effet, lorsqu'on commence à la prendre à l'adolescence, on ne se rend pas forcément compte de ce qui est notre véritable comportement et de ce qui est induit par ce petit comprimé. Ce qui est vrai, c'est que de nombreuses personnes qui ont arrêté la pilule ont ressenti un mieux-être.

Pour des personnes qui ne prennent pas la pilule, ces changements au niveau psychologiques peuvent paraître dérisoires. Pourtant, lorsqu'on sait que la plupart des femmes commencent la pilule à l'adolescence et ne l'arrêtent que des années plus tard, souvent après avoir eu des enfants dans le but de se faire poser un stérilet en cuivre (donc sans hormones), cela signifie parfois plusieurs dizaines d'années à vivre sous l'influence des hormones délivrées par la pilule, à subit des épisodes dépressifs, une instabilité émotionnelle, à perdre l'envie et la motivation de faire des choses, des années à ne pas être véritablement soi-même. Il existe des centaines de témoignages de femmes qui, à l'arrêt de la pilule, ont le sentiment de s'être retrouvées, d'avoir enfin retrouvé stabilité émotionnelle et joie de vivre.

Bien sûr, cela n'est pas le cas pour toutes les femmes, et beaucoup d'entre elles qui subissaient une instabilité émotionnelle ou des troubles psychologiques au cours de leur cycle menstruel ont justement pu y mettre fin grâce à la prise de la pilule.

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Quel est le lien entre pilule et dépression ?

C'est là que le bât blesse : pour le moment, nous ne le savons pas avec certitude. En 2016, la psychologue Lisa Welling a réalisé une étude en analysant les moyens de contraception sur 154 femmes et a émis l'idée que la dose d'hormones synthétiques ingérées pourrait impacter la personnalité. Elle a notamment découvert que les femmes qui prenaient un moyen de contraception fort en oestrogène étaient plus intraverties et avaient plus de risques de souffrir de névroses. Or, on sait que les contraceptifs bloquent la production naturelle d'oestrogène et de progestérone, et les garde à un niveau stable tout au long du cycle, alors qu'ils sont censés varier et être produits dans des doses différentes.

Selon les diverses études réalisées, il semblerait qu'environ 30% des femmes soit sensible aux moyens contraceptifs au point de développer des troubles psychologiques. C'est une proportion très élevée, mais malheureusement les mécanismes biologiques restent encore à ce jour flous. Or, quand on sait que 47% des femmes qui ont arrêté la pilule l'ont fait pour des raisons de mal-être psychologique et sexuel (étude de l'Université d'Indiana), il est important de lancer des études pour comprendre pourquoi certaines femmes ressentent ces troubles, alors que d'autres soient au contraire satisfaites et constatent une sérénité qu'elles n'avaient pas avant, et ainsi proposer de nouvelles alternatives qui s'adaptent au mieux.

C'est la raison pour laquelle beaucoup de femmes choisissent d'ailleurs de se tourner vers le DIU en cuivre (dispositif intra-utérin, anciennement stérilet). Contrairement aux idées reçues, il n'est pas dédié aux femmes qui ont déjà eu des enfants : toutes peuvent l'utiliser, il n'y a aucune contre-indication au niveau de l'âge, et celui-ci ne libère pas d'hormones. Il n'a donc pas d'effets secondaires psychologiques. Le plus important est toutefois de pouvoir discuter librement avec son médecin ou son gynécologue des possibilités existantes en matière de contraception, tout en prenant en compte les éventuels effets secondaires.

Photos : Shutterstock

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Commentaires 1
  • PRATS Henri

    La pilule rendrait les femmes plus dépressive (40% ) ? J'ose la réciproque : la pilule serait davantage prise par les femmes dépressives (qui s'adonneraient plus facilement pour adoucir un mal être. ..?)

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