Pourquoi les Ados consultent-ils?

L'adolescent d'aujourd'hui a toutes les raisons d'aller mal. Comment avoir confiance en l'avenir dans une société anxiogène soumises aux flux d'informations toutes plus alarmistes les unes que les autres. Que veut un ado qui consulte

16 NOV. 2022 · Lecture : min.
Consultation adolescente

Pourquoi les ado consultent-ils ?

Le climat anxiogène post Covid, l'atmosphère dystopique diffusée par les chaines d'informations relayant non-stop les reportages sur la détérioration du climat et la guerre en Europe de l'est, sont autant de raisons pour un jeune adulte de se sentir angoissé face à l'avenir le plaçant dans un immobilisme contre-nature mais rassurant.

Ma pratique est d'orientation analytique et installée en libéral, je reçois beaucoup d'adolescents ou de jeunes adultes depuis la crise du Covid sur fond de : "à quoi bon me donner tant de mal puisque tout va aller de plus en plus mal".

Ce sont aussi de grandes angoisses existentielles qui les étouffent ou les entrainent dans des ruminations sans fin, sur leur présent, leur avenir.

On sait que l'adolescent n'a pas la capacité de se projeter dans l'avenir. La question de la temporalité chez l'adolescent est primordiale. En effet, à l'adolescence, le temps est venu de faire le deuil de l'enfance, de l'innocence, de l'insouciance pour entrer dans un monde, avec lequel, la majorité du temps, l'adolescent est en conflit, celui des adultes.

Dans beaucoup de cas, les angoisses et l'anxiété que cette perspective génèrent, donnent lieu à des symptômes très pénibles voire invalidants comme des crises d'angoisses, des insomnies, des troubles du comportements alimentaires, de la dépression, une consommation d'alcool ou de drogues, un retrait ou un repli sur soi pouvant évoluer en phobie sociale.

Si les symptômes de ces troubles peuvent passer inaperçus ils n'en restent pas moins présents et peuvent s'aggraver en perdurant dans le temps sans prise en charge appropriée.

L'adolescent se trouve empêché dans son quotidien, dans ses études, dans ses relations aux autres et se renferme sur lui-même, stoppant son développement, dépensant toute son énergie au camouflage de son malêtre et aux efforts déployés pour prétendre aller bien, faire "comme si."

Cette étape que représente l'adolescence et qui est propice aux remaniements psychiques, se trouve utilisée à contre-emploi et elle n'est pas éternelle.

La psychothérapie offre un cadre confidentiel et rassurant où l'adolescent pourra s'exprimer librement, projeter dans le cadre neutre de la séance ses mouvements pulsionnels, que ce soit ses peurs, son agressivité, sa tristesse ou ses angoisses.

Accompagner sans interpréter, pour leur permettre d'achever d'élaborer ce qui, psychiquement, ne l'est pas encore tout à fait. L'adolescence, c'est cette fenêtre temporelle qui permet de revisiter, de remanier les étapes de l'enfance structurantes pour finaliser le processus d'individuation. Elle est d'autant plus importante que cette fenêtre finit toujours par se refermer.

Et les parents dans tout cela me direz-vous ?

Les parents sont mes interlocuteurs car les ados sont mineurs, mais le patient reste l'adolescent.

La "crise" d'adolescence comme on aime la nommer est une crise familiale car l'entourage de l'adolescent doit aussi faire face au deuil de l'enfant qu'il a connu, qui les a aimé inconditionnellement et qui investi à présent d'autres objets d'amour dont les parents sont exclus.

Le travail de la famille pour accueillir "l'étrangeté" de l'adolescent et l'étranger qu'il peut représenter, est parfois difficile et se fait dans la douleur et l'incompréhension. Les transformations physiques et comportementales sont perçues comme inacceptables autant que l'idée même du petit enfant englouti dans ce grand corps à la démarche dégingandée et qui ne reviendra plus jamais.

La dépendance entre les parents et l'adolescents, et vice et versa, réactive les enjeux du lien et la problématique narcissique des parents. L'adolescent ne se ressemble plus, ne ressemble plus ni au père ni à la mère, bref, on ne se reconnait plus et on ne parle plus la même langue.

Il est fréquent de proposer du soutien aux parents rendus perplexes et perdus face au à la traversée de l'adolescence de leur enfant. Il s'agit des les amener à admettre qu'ils doivent tenir leur place, mais dans une moindre mesure, le temps où ils étaient indispensables à tout et pour tout n'est plus.

Les parents et les thérapeutes ne sont pas dans le même rôle, c'est important de le comprendre.

L'adolescence marque le désinvestissement des premiers objets d'amour et se séparer des parents, trouver d'autres centre d'intérêt se fait parfois dans la douleur de l'arrachement.

Le thérapeute peut servir de trait d'union, de relais, pour aider à grandir sans nécessairement entrer en conflit, pour réduire l'agressivité et construire avec les parents une relation à la hauteur, c'est à dire une relation d'adulte, entre adultes.

Photos : Shutterstock

PUBLICITÉ

psychologues
Écrit par

Psychologue.net

Notre comité d'experts, composé de psychologues, psychothérapeutes et psychopraticiens agréés, s'engage à fournir des informations et des ressources précises et fiables. Toutes les informations sont étayées par des preuves scientifiques et contrastées pour garantir la qualité de leur contenu.
Consultez nos meilleurs spécialistes en crise existentielle

Bibliographie

  • La temporalité à l'adolescence : les avatars du processus de temporalisation pubertaire. Benoit Blanchard, Toré Balkan, dans La psychiatrie de l'enfant 2009/2 (Vol.52) pages 373 à 402

  • Futur, Dominique Texier dans Adolescences contemporaines (2011), pages 185 à 190

Laissez un commentaire

PUBLICITÉ

derniers articles sur crise existentielle

PUBLICITÉ