Pourquoi ai-je toujours faim ?

Notre rapport à l'alimentation se fait souvent de manière automatique. Pour notre bien-être, nous devons apprendre à être conscients de la manière dont nous mangeons.

14 NOV. 2017 · Lecture : min.
Pourquoi ai-je toujours faim ?

Nos habitudes alimentaires actuelles sont bien loin de celles de nos ancêtres ! Plus besoin de chasser pour se nourrir ou d'aller sarcler les légumes : un petit tour au supermarché, deux clics sur internet et on se retrouve avec des plats tout prêts comme on aime. La sensation de faim, que nous éprouvons plusieurs fois par jour, est comblée instantanément.

La sensation de faim est déclenchée par une hormone sécrétée par l'estomac, la ghréline. La production se lance lorsque l'organisme manque de sucre ou de graisse, c'est un facteur physiologique, mais elle se lance aussi par pure habitude (si vous mangez tous les jours à 12:15, il est probable que votre estomac se mette à gronder quelques minutes avant).

Aujourd'hui, notre nourriture est totalement accessible, partout, tout le temps. À la moindre sensation de faim, on peut trouver près de soi quelque chose à manger. Et il est important de comprendre que, pendant des millénaires, notre alimentation a toujours été la même (consommation de produits frais et non transformés). Mais, depuis plus de 50 ans, notre mode d'alimentation a radicalement changé : de traditionnel, il est devenu industriel. Notre consommation de viande et de produits laitiers a explosé (depuis 1950, les français consomment deux fois plus de viande et poisson et quatre fois plus de produits laitiers), et nous sommes passés à des aliments transformés de manière industrielle.

Le problème, c'est que les modifications de l'organisme humain se font sur des centaines d'années. Depuis 1950, nos organismes n'ont pas pu s'habituer à un tel déferlement de produits transformés, d'ingestion de telles quantités de sel et de sucre (en 1950, les français consommaient 20kg de sucre par an ; en 1996, 75 kg).

Pourquoi mangeons-nous des produits transformés ?

Nous sommes de plus en plus sensibilisés aux problématiques des produits transformés : très caloriques, trop sucrés et salés, bourrés de produits non nécessaires et mauvais pour notre organisme... Et pourtant, si nous continuons d'en consommer, c'est parce qu'ils génèrent une dépendance.

En effet, manger, et plus particulièrement certains aliments (comme le sucre) sont une récompense pour le cerveau. Or, la perspective d'obtenir une récompense oriente nos actions et décisions. Le cerveau est influencé de deux façons par une récompense: d'une part, il va prendre les décisions nécessaires pour obtenir cette récompense, et d'autre part, il aura une sensation de plaisir une fois la récompense obtenue. Et si elle est vraiment bonne, il cherchera à en avoir une autre. Kent C. Berridge, chercheur en psychologie de l'Université du Michigan, parle de "wanting" (désirabilité) et de "liking" (satisfaction) pour ce processus. Sa conclusion est la suivante : pour qu'une récompense soit irrésistible pour le cerveau, elle doit être optimale en termes de désirabilité et de satisfaction.

Or, les produits industriels jouent sur ces deux tableaux : ils sont conçus pour être aussi alléchants que satisfaisants. D'où le cercle qui se met en place : le cerveau développe une dépendance à ces produits, et nous continuons d'en vouloir car ils représentent la récompense ultime.

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Mais comment les industries parviennent-elles à influer autant sur notre cerveau ?

Tout d'abord, elles travaillent énormément sur l'appétence de leurs produits. Et avant l'aspect du produit en lui-même, cela passe par un gros travail sur les emballages. Tout est soigné pour nous faire apprécier le produit avant même de l'avoir testé. L'aspect du produit est-lui même modifié par des colorants, conservateurs ou autres additifs. C'est ce qui fait que, par exemple, le jambon reste rose (alors qu'il devient normalement grisâtre après quelques jours) ou que nos produits se conservent pendant des mois, même s'il fait très chaud (graisses hydrogénées).

Ensuite, les recettes des produits industriels sont très recherchées et travaillées pour faire atteindre à notre cerveau le point F, le point de félicité. En effet, ce que le cerveau aime, ce sont les aliments qui associent le sucre, le sel et les graisses. Et c'est à un équilibre parfait entre ces trois éléments que les aliments industriels essayent de tendre. Évidemment, notre cerveau en redemande et nous incite à en consommer toujours plus.

Or, consommer des produits industriels a des conséquences, aussi bien sur notre planète que sur notre santé.

L'utilisation de pesticide a nonuplé depuis 1960, la culture des OGM représente aujourd'hui 10% des surfaces agricoles, et 83% des volailles et 95% des porcs sont élevés de manière industrielle. Outre le fait qu'elles ne voient jamais le jour entre leur naissance et leur mort, on donne à ces bêtes des antibiotiques et hormones pour accélérer leur croissance. Antibiotiques et hormones que nous finissons donc par avaler nous aussi.

Actuellement, de nombreuses études sont en cours pour déterminer l'impact d'une telle alimentation sur notre santé. Ceci étant, on note depuis plusieurs années une explosion des cas de cancers, diabète de type 2, maladies cardio-vasculaires, allergies et intolérances alimentaires. D'après la plus grande étude réalisée sur l'alimentation dans le monde (Global Burden Disease 2013), une mauvaise alimentation est le principal facteur de risque. En France, 44% des décès y seraient liés : plus que le tabac !

L'élevage industriel est aussi une énorme source de pollution : les animaux à l'état sauvage ne représentent plus que 3% de la planète, alors que les hommes et les animaux d'élevage sont 97%. Et l'industrie agro-alimentaire est la principale source d'émissions de gaz à effet de serre, mauvais pour toutes les vies sur la planète.

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Comment manger mieux ?

Il existe de nombreuses solutions pour apprendre à manger mieux sans dire adieu à la notion de plaisir que notre cerveau affectionne tant. Tout d'abord, il est important de prendre conscience que nous n'avons pas besoin de consommer tant de produits industriels, mais sans culpabiliser sur nos habitudes alimentaires. Évidemment, acheter au supermarché est plus simple et moins onéreux que d'acheter ses produits biologiques au marché. Pour autant, les supermarchés proposent de plus en plus d'alternatives biologiques et locales, qui peuvent être de bonnes solutions pour se lancer dans la prise de conscience de l'alimentation.

  • Tout cuisiner soi-même : on part ici de l'idée qu'aucun aliment n'est fondamentalement mauvais tant que vous le préparez vous-même : pizza, pain, lasagnes... Et en plus, il est prouvé que faire la cuisine est excellent pour notre bien-être !
  • Just Eat Real Food (JERF : mangez juste de la vraie nourriture) : ici, il s'agit d'éviter les produits transformés industriellement et de miser sur des aliments de base biologiques.
  • Apprenez à retrouver la sensation de satiété : nous sommes dans un monde où tout va vite, et donc nous mangeons aussi trop rapidement. Or, notre sensation de satiété ne se déclenche que 15 à 20 mn après le début du repas. Faites attention de bien manger doucement, mâchez bien (comptez jusqu'à 10 avant d'avaler), posez votre fourchette entre chaque bouchée et profitez-en pour parler avec vos convives.
  • Réduire sa consommation de viande et produits laitiers : nous n'avons pas besoin de consommer de la viande à chaque repas, et notre corps n'est plus fait pour digérer les produits contenant du lait de vache une fois adulte. Réduire leur consommation est bon pour la planète, pour le corps et pour le porte-monnaie !
  • Prenez conscience de ce que vous achetez au supermarché : il est vrai que les produits de supermarché ont l'avantage d'être plus accessibles, mais il nous faut apprendre à prendre conscience de nos achats. Ainsi, il faut parfois accepter de payer un peu plus cher pour des produits de meilleure qualité (biologiques et locaux, par exemple).

Vous pouvez aussi vous diriger vers une alimentation flexitarienne (manger de la viande occasionnellement), végétarienne ou végétalienne, ou privilégier les aliments locaux ou biologiques pour éviter de passer par les produits industriels. Réduire les produits industriels ne signifie pas faire une croix sur le plaisir de manger, mais bien plutôt redécouvrir d'autres manières de se nourrir, qui n'offrent pas toujours une récompense immédiate au cerveau, mais apportent un contentement plus profond.

Photos : Shutterstock

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Commentaires 1
  • Lucie

    Bon article, facile à comprendre

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