Que nous dirait un enfant autiste s'il pouvait s'exprimer ?

Les troubles du spectre autistique regroupent de nombreuses formes d'autisme, plus ou moins sévères. Les enfants, adolescents et adultes autistes souffrent de beaucoup de préjugés à propos de leur vie. Mais que vous dirait un enfant autiste s'il pouvait communiquer avec vous ?

C'est dans la première année et demie de l'enfant que l'on peut observer si son développement suit un cours classique ou non, car c'est le moment où tous les apprentissages commencent à se consolider.

Les symptômes que l'on peut commencer à observer en cas de trouble du spectre autistique sont :

• Difficultés pour se socialiser avec les enfants du même âge,
• Contact visuel faible à nul,
• Évitement des contacts physiques,
• Pas de réponse lorsque l'enfant est appelé par son prénom,
• Communication ou langage précaires,
• Réalisation de mouvements répétitifs (stéréotypés),
• Peu de tolérance face à la frustration,
• Rires ou pleurs sans motif apparent et manque de jeux créatifs, entre autres.

Pour les parents, c'est un processus difficile. Depuis l'anxiété de savoir que quelque chose ne va pas, en passant pas le désespoir de trouver un professionnel qui reconnaisse ce dont souffre l'enfant, jusqu'au processus de deuil de l'enfant "sain" qu'ils avaient, et dont ils savent qu'il aura des difficultés toute la vie. Le processus d'adaptation de la famille à cette situation est un défi complexe.

C'est pour cela que l'appui d'un professionnel de la psychologie est recommandé pour aider la famille et ses différents membres à surmonter toutes les phases et à bien vivre sans anxiété.

Ángel Rivière est un psychologue espagnol spécialisé en autisme reconnu internationalement. Cet auteur propose une perspective humaine et basée sur la proximité pour comprendre, gérer et vivre avec une personne autiste. Il se base sur vingt postulats pour expliquer ce que vivent les enfants autistes.

Les 20 concepts fondamentaux

1- Aidez-moi à comprendre. Organisez mon monde et facilitez-le moi afin d'anticiper les choses. Donnez-moi de l'ordre, structurez mon monde et évitez-moi le chaos.

2- Ne soyez pas angoissé avec moi, car cela m'angoisse à mon tour. Respectez mon rythme : vous pourrez toujours nouer des liens avec moi si vous comprenez mes besoins et mon mode particulier de compréhension de la réalité. Ne déprimez pas, j'ai besoin de votre soutien, pensez qu'il est naturel que j'avance et que je me développe à mon rythme.

3- Ne me parlez pas trop, ni trop vite. Les mots sont comme de l'air qui ne pèse rien pour vous, mais qui peuvent être une charge lourde pour moi. Souvent, ce n'est pas la meilleure solution pour nouer des liens avec moi.

4- Comme les autres enfants, comme les adultes, j'ai besoin de partager mes joies et j'aime faire bien les choses, même si je n'y arrive pas toujours. Faites-moi savoir d'une manière ou d'une autre, lorsque je fais bien les choses et aidez-moi à les faire sans rater. Lorsque j'accumule trop d'échec, il m'arrive la même chose qu'à vous : je m'irrite et je finis par ne plus vouloir faire les choses.

5- J'ai besoin d'ordre et de pouvoir anticiper les actions. Il nous faut négocier mes rituels pour pouvoir vivre ensemble.

6- Il est difficile pour moi de comprendre le sens de nombreuses choses que vous demandez de faire. Aidez-moi à les comprendre. Il s'agit de me demander des choses qui peuvent avoir un sens concret et déchiffrable pour moi. Ne me permettez pas de m'ennuyer ou de rester inactif.

7- Ne m'envahissez pas excessivement. Parfois, vous êtes imprévisibles, bruyants et trop stimulants. Respectez les distances dont j'ai besoin, sans me laisser seul.

8- Ce que je fais, ce n'est pas contre vous. Lorsque j'ai une crise de colère ou que je frappe, que je casse des objets ou que je bouge trop, lorsqu'il m'est difficile de comprendre ou de faire ce que vous me demandez, je n'essaye pas de vous faire du mal. Comme j'ai des problème d'intentions, ne m'en attribuez pas de mauvaises !

9- Mon développement n'est pas absurde, même s'il n'est pas facile à comprendre. Il a sa propre logique et beaucoup des conduites que vous dites "altérées" sont des manières de faire face au monde depuis ma manière spécifique d'être et de percevoir. Faites un effort pour me comprendre.

10- Les autres personnes, vous êtes trop compliquées. Mon monde n'est pas complexe ni fermé, mais simple. Même si ce que je dis vous semble étrange, mon monde est si ouvert, sans fards ni mensonges, si innocemment exposé aux autres qu'il est difficile d'y pénétrer. Je ne vis pas dans une "forteresse vide", mais plutôt dans une plaine si ouverte qu'elle peut sembler inaccessible. J'ai beaucoup moins de complications que les personnes que vous considérez comme normales.

11- Ne me demandez pas toujours la même chose, n'exigez pas de moi les mêmes routines. Vous n'avez pas besoin de faire l'autiste pour m'aider. L'autiste c'est moi, pas vous.

12- Je ne suis pas juste autiste. Je suis aussi un enfant, un adolescent ou un adulte. Je partage beaucoup de choses des enfants, adolescents ou adultes que vous appelez "normaux". J'aime jouer et me divertir, j'aime mes parents et mes proches, je me sens satisfait lorsque je fais bien les choses. Il s'agit plus de ce que nous partageons plutôt que de ce qui nous sépare.

13- Vivre avec moi vaut la peine. Je peux vous offrir tant de satisfactions, tout comme les autres personnes, bien qu'il ne s'agisse pas des mêmes. Il y aura peut-être un moment dans votre vie où moi, qui suis autiste, serai votre meilleure compagnie.

14- Ne me bourrez pas de médicaments. Si on vous a dit que je devais prendre des médicaments, faites réviser régulièrement la prescription par un spécialiste.

15- Ni mes parents ni moi ne sommes coupables de ce qu'il m'arrive. Les professionnels qui m'accompagnent non plus. Il ne sert à rien de se culpabiliser les uns les autres. Parfois, mes conduites et réactions peuvent être difficiles à comprendre et à affronter, mais ce n'est de la faute de personne. L'idée de "faute" n'induit que des souffrances quand il s'agit de moi.

16- Ne me demandez pas constamment de faire des choses au-delà de mes capacités. Demandez-moi des choses dont je suis capable. Offrez-moi de l'aide pour être plus autonome, pour mieux comprendre, mais ne m'aidez pas plus.

17- Vous n'avez pas besoin de changer totalement votre vie parce que vous vivez avec une personne autiste. À moi, cela ne sert à rien que vous soyez mal, que vous vous refermiez sur vous-même et que vous déprimiez. J'ai besoin de stabilité et de bien-être émotionnel autour de moi pour me sentir mieux. Pensez que votre compagnon ou compagne n'est pas non plus responsable de ce qu'il m'arrive.

18- Aidez-moi naturellement et sans que cela devienne une obsession. Pour pourvoir m'aider, vous devez avoir vos propres moments de détente pour pouvoir vous dédier à ce que vous aimez. Rapprochez-vous de moi, ne vous en allez pas mais ne vous sentez pas comme si portiez le poids du monde sur vos épaules. Dans ma vie, j'ai vécu des moments difficiles, mais je peux me sentir mieux chaque jour.

19- Acceptez-moi comme je suis. Ne conditionnez pas votre acceptation au moment où je ne serais plus autiste. Soyez optimiste sans vous faire de films. Ma situation s'améliore en règle générale, même si pour l'instant il n'existe pas de remède.

20- Même s'il est difficile pour moi de communiquer ou de comprendre les subtilités sociales, j'ai moi aussi des avantages par rapport aux personnes que vous dites "normales". Communiquer est dur pour moi, mais je n'ai pas l'habitude de mentir. Je ne comprends pas les subtilités sociales, mais je ne participe pas non plus au jeu des doubles intentions ou aux sentiments dangereux si fréquents dans la vie sociale. Ma vie peut être très satisfaisante si elle est simple, ordonnée et tranquille. Ne m'en demandez pas trop ou ce que je ne peux pas faire. Être autiste est une façon d'être, même si elle n'est pas "normale". Ma vie en tant qu'autiste peut être très heureuse et aussi satisfaisante que la vôtre "normale". Chacun de notre côté ou ensemble, nous pouvons partager de nombreuses expériences fabuleuses et riches.

Il est important de trouver une manière de vivre sereine, où vous pourrez profiter des personnes que vous aimez, qu'elles soient comme elles soient. Vous n'avez qu'une seule vie. Ne la gâchez pas avec des plaintes, de la culpabilité, cela génère uniquement de la souffrance. Apprenez à vivre avec votre situation, il est des maladies qui ne peuvent pas guérir. Profitez de votre fils ou de votre fille. Il ou elle a besoin de vous. Et s'il ou elle pouvait communiquer facilement, il ou elle vous dirait sûrement :

Vous n'avez pas besoin de tout comprendre de moi, mais je viens pour vous rappeler qui vous êtes.

Photos : Shutterstock

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