La relation thérapeutique durant le confinement : distance et trauma

L’apprentissage est au cœur de nos métiers qui nécessitent le suivi à des formations régulières, seul moyen pour consolider, perfectionner et approfondir ses connaissances et compétences et

27 AVRIL 2020 · Lecture : min.
La relation thérapeutique durant le confinement : distance et trauma

La situation sanitaire actuelle avec le Covid 19 entraine des situations d'isolement, de confinement, des confrontations avec la maladie et la mort, des modifications radicales des habitudes.

Il s'agit d'une situation traumatique collective, inédite, subite et dramatique.

Vers un réaménagement des pratiques

Au niveau psychologique, pouvoir répondre aux appels au secours face à la détresse est alors indispensable pour enrayer rapidement les crises d'angoisses, éviter des décompensations lourdes de conséquences, contenir la multiplication de troubles psychiques importants et limiter et canaliser les répercussions la famille et les enfants, et ce à une très large échelle de l'ensemble de la société.

La situation d'aujourd’hui amène à un réaménagement des pratiques, tant pour le patient que pour le psy. Le cadre déontologique avec la question de l'image et de son utilisation, des conditions et des techniques de travail nouvelles avec le téléphone ou la vision, des demandes d'écoute sans être nécessairement des demandes de suivis thérapeutiques avec les personnes qui craquent plus isolées que désireuses de faire un travail sur soi. Plus que jamais le psy est le lieu où aller, comme une dernière chance, sans autre solution.  Entre le service du 15 et le divan, qu'en est-il de la relation thérapeutique durant ce confinement ?

La relation thérapeutique durant ce confinement

Plus que jamais le transfert et le contre transfert sont mis à l'épreuve. Qu en est il de l identification via le tiers de l écran ou en l absence de l image? La fonction projective passe t elle encore plus par l imaginaire que par le regard dans sa pulsion scopique? Ce hors champs visuel lorsque l image n est pas là n’est il pas en fin de compte une ouverture et une difficulté moindre pour passer le cap d’une thérapie difficile en face à face. La distance et la présence sont plus que jamais à questionner.

Le confinement entraine une impossibilité de maintenir les consultations en cabinet et la mise en place pour les professionnels qui le souhaitent de pouvoir assurer des suivis thérapeutiques et analytiques à distance. C'est une nouveauté et un challenge pour beaucoup, parfois un blocage. Sublimation ou impasse ? Ouverture du champs des possibles en tout cas à saisir comme une possibilité de mieux se découvrir, tant du côté du psy que du patient. Une naissance en somme.

La psychanalyse a toujours permis un chemin vers une ouverture, celle du champ des possibles pour dépasser le conflit, pour se rapprocher de soi, afin que, par la créativité, chacun puisse trouver des voies de sublimation vers un mieux-être. Si le Covid aujourd'hui remet en cause nos pratiques professionnelles traditionnelles posées sur un relationnel qui est remis en question, suite au confinement, il ne remet pas en cause la « relation ». Bien au contraire, elle devient plus que jamais nécessaire, mettant la parole au centre du débat.

Le cadre lui-même change par un travail à distance or la frustration, le changement et l'adaptation font aussi partie de nos vies, dans le travail d'un deuil et de l'acceptation de la perte pour donner naissance à autre chose. Telle est la psychanalyse qui depuis sa naissance a su demeurer dynamique et novatrice au fil du temps tout en gardant son noyau d'origine : l'inconscient.

Il s'agit bien avec le Covid d'établir un mode relationnel thérapeutique différent pour qu'il perdure et cela n'exclut en rien la relation thérapeutique et la relation d'aide, laquelle doit être cependant révisée, dans le fond, à distance, et la forme. Plus que jamais la distinction entre distance et séparation doit être éclaircie.

Enfin, la relation d'aide n'est pas une relation classique et si on la crée il faut être responsable de ce que nous mettons en place : savoir la faire mais aussi défaire ainsi que la poser dans le cadre thérapeutique le plus proche de ce que nous pouvons faire en situation normale est absolument nécessaire.

Ensuite, comment aider quand on est soi-même dans la même situation, au même moment ? Quels mots justes trouver quand on a en face quelqu'un qui, comme soi, est confiné à la maison, en colère, face à la mort, la sienne ou le décès d'un proche, la maladie, le même télétravail, la même séparation, les mêmes devoirs à gérer, les mêmes enfants à canaliser, le même soucis d'argent, la même peur de mourir, le même espoir d'autre chose, le même ennui à gérer ? Ceci sans recul aucun. Ceci dans une immédiateté. Qu'en est- il du contre transfert, de l'ensemble de ses réactions inconscientes, ses projections ? La relation d'aide incluant la prise en compte du contre transfert doit rester thérapeutique plus que jamais avec les outils qui protègent à la fois le patient et l'analyste. Les dégâts sont déjà suffisants. Êtes-vous prêts...? Vraiment prêts...?

On ne va pas au feu quand on n'est pas assuré.

L'urgence n'exclut pas le professionnalisme. 

Photos : Shutterstock

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Écrit par

Corinne Vera Alexandre

Psychanalyste, Hypno analyste, Psychothérapeute et Sexothérapeute, elle exerce dans le Vaucluse à Bollène et Avignon ainsi qu'en ligne. Elle utilise les thérapies brêves en association de la psychanalyse dans une pratique intégrative en EMDR et en Hypnose.Sa pratique est aussi psychocorporelle avec l'hypnose et de la médiation corporelle.

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