Amie endeuillée qui ne supporte plus la réussite des autres
Bonjour,
C'est assez difficile d'écrire ces mots, car je culpabilise vis-à-vis de mon amie endeuillée. J'appréhende même qu'elle tombe sur ce post, mais j'ai besoin d'aide...
Je connais mon amie depuis presque 10 ans et nous échangeons presque tous les jours. Deux ans après notre rencontre, elle rencontrait son futur mari. Dans le même temps, je rencontrais le meilleur ami de son futur mari avec qui je me suis mise en couple. Nous faisions pas mal de sorties tous les quatre à ce moment et avons passé tout un été ensemble. Malheureusement, quelques semaines plus tard, la nouvelle est tombée pour le copain de mon amie : il était atteint d'un cancer.
La nouvelle nous a tous secoués, mais son meilleur ami, mon copain à l'époque, restait très distant et ne prenait pas de nouvelles de son propre meilleur ami. Je le faisais à sa place. Les deux amis se sont donc éloignés. Mon amie ne souhaitait plus voir mon copain de l'époque non plus au vu de son attitude, mais notre relation amicale n'a pas été entachée. Pour autant, mon amie et son copain continuaient leur vie et sortaient avec leurs amis communs de l'université. Je sortais de mon côté également, mais finalement, je ne voyais mon amie qu'une à deux fois par an, avec plusieurs messages dans la semaine.
Quatre ans après, je me séparais de mon copain de l'époque, ce qui a évidemment mis en joie mon amie et son copain. Pendant ma séparation, mon amie avait été présente et s'était rendue disponible le jour où j'avais été au plus mal, mais nous ne nous étions pas revus dans l'immédiat ensuite. J'ai traversé cette mauvaise passe avec deux amis d'enfance qui m'ont aidé à me relever.
Par la suite, j'ai rencontré mon conjoint actuel que je leur ai présenté et le courant est plus que bien passé. Nous nous sommes vus quelques fois, mais toujours deux à trois fois dans l'année, en continuant de s'envoyer des messages très souvent. Elle me disait être très prise par son travail et ses tâches du quotidien, donc je n'insistais pas plus que ça. Son conjoint travaillait en décalé aussi et ils se voyaient peu souvent, je ne voulais pas leur voler leurs seuls moments.
Mais il y a deux ans, mon amie et son conjoint se sont mariés et j'ai rencontré une copine de mon amie à cette occasion. Nous avons échangé toutes les deux pour lui organiser un joli evjf. En parlant avec cette dernière, j'ai compris qu'elle voyait très souvent mon amie, qu'elles se faisaient pas mal de restaurants ou de repas à domicile avec une autre copine encore, etc. Je n'ai pas ressenti de jalousie, mais de déception face à mon amie qui me disait être très peu disponible. J'en ai parlé à mon amie, qui s'est excusée, mais qui m'expliquait que cette copine avait souvent les mêmes horaires décalés contrairement à mes disponibilités en horaire de bureau, qu'elle était plus proche de chez elle en termes de distances, etc. Mon amie a ensuite essayé de se libérer en m'envoyant son planning pour me montrer ses disponibilités. Nous avons fait une seule sortie suite à ça, mais le cœur n'y était plus pour moi. C'était comme s'il fallait juste me contenter pour me faire plaisir.
Malheureusement, la maladie a emporté son mari quelques mois après leur mariage à seulement 29 ans. Depuis deux ans, elle est en deuil et se bat chaque jour pour sortir la tête de l'eau. Elle paraît très forte de l'extérieur, mais la gestion de ses émotions est encore difficile. Elle voit une art thérapeute avec qui elle fait un travail formidable, ça l'aide vraiment beaucoup, mais elle doit poursuivre sa thérapie.
Depuis que son mari nous a quittés, je me suis montrée présente au quotidien avec une très grande empathie, en oubliant toute rancœur. Mon conjoint est très présent également et lui apporte beaucoup de conseils. Elle est venue plusieurs fois dormir chez nous, elle a passait des jours et des weekends entiers, elle était notre invitée et nous l'avons chouchouté pour qu'elle se sente à l'aise et qu'elle puisse nous parler pour se libérer et ne pas être seule. Nous étions passées de deux à trois visites par an à deux à trois visites par mois.
Nous avions organisé un voyage de quelques jours à trois pour qu'elle puisse prendre l'air et voir autre chose, mais là, ça a commencé à coincer. Elle imposait presque son programme. Elle voulait prendre le contrôle de tout. J'ai eu une violente migraine en rentrant de randonnée. En voulant m'aider à aller m'allonger, je lui ai dit que j'étais désolée qu'elle me voit dans cet état. Elle m'a sorti très sèchement quelque chose comme "C'est bon, ne me la fait pas à moi". Mon conjoint a ensuite pris le relais et m'a donné mes médicaments. Quand ça allait mieux, j'ai appelé mon amie depuis la chambre en lui demandant comment elle allait : elle m'a répondu sèchement que mon copain devait venir l'aider à nettoyer son appareil photo qui était soit disant trempé suite à la randonnée. En les rejoignant à table pour le repas du soir, l'ambiance était glaciale. J'ai demandé à mon amie si elle allait bien, mais répondait de façon très particulière et évitait le sujet. J'étais excédée par la situation le reste du séjour. Elle a voulu changer le programme, puis elle marchait seule en nous devançant constamment sans jamais nous attendre. Elle a eu des réflexions très désobligeantes sur notre conduite en voiture alors que nous étions en montagne et qu'il était difficile de rouler sur des routes en zig-zag, alors qu'elle ne freinait même pas sur les dos d'âne et ne roulait vraiment pas prudemment. Lors de notre départ, elle a voulu prendre en main le rangement des affaires que j'avais déjà commencé et que je finalisais. J'ai haussé le ton sans le vouloir. J'avais perdu patience. Le retour s'est fait dans un froid glacial et j'ai été très distante pendant près d'une semaine ensuite. Elle a contacté mon conjoint pour savoir si j'allais bien et j'ai été lui expliqué mon ressenti. Elle s'est excusée et s'est sentie très mal, me disant que c'était sûrement sa névrose et qu'elle s'en voulait. Elle m'avait avoué à demi mot que le fait de partir avec nous en tant que couple avait été difficile. Pourtant, mon conjoint et moi sommes assez pudiques en public et devant nos proches, avec très peu de rapprochements. Nous ne nous sommes pas revues pendant deux mois après ça, car elle appréhendait nos retrouvailles, mais nous nous parlions par message chaque jour.
Tout s'est bien passé quand nous nous sommes revus, mais j'avais décidé d'espacer les visites car je travaille à mon compte et mes projets me prennent énormément de temps. Je continuais d'être très disponible pour elle malgré tout. Ses autres amis étaient disponibles aussi, mais n'essayait pas de la comprendre. Ils l'ont encouragé à aller sur des sites de rencontre et ont même voulu lui présenter une personne plus âgée juste pour "avoir de la compagnie". Mon amie essayait de défendre ces idées avant de m'avouer que ce n'était pas ce qu'elle voulait. Cette situation n'aidait pas mon amie et je m'efforçais de "réparer les bêtises" des autres. En attendant, nos visites se sont de plus en plus espacés, car ses moments de "névrose" (comme elle les appelait) se multipliaient. Plusieurs fois, elle me demande des détails précis de mes projets en cours et me répond ensuite de façon très blessantes ou ne prend pas le temps de me lire, et me répond une phrase bateau. Elle a tendance à appuyer des sujets sensibles en faisant constamment ressortir le négatif. Je lui avais fait part de mon ressenti plusieurs fois et ça s'était à nouveau calmé, mais la situation finit par se rejouer en boucle et se joue à nouveau aujourd'hui.
Aussi, elle se réjouit très peu des projets de ses amis, notamment le mariage de cette fameuse copine qui approche bientôt. Chaque proche a le droit à son lot de critiques et j'ai peur d'en faire partie. Mes projets évoluent rapidement aussi : entre mon entreprise qui prend de l'ampleur et mon projet immobilier, j'ai du mal à savoir si son engouement est sincère ou non. En lui montrant de premières annonces de biens, elle se montrait très détachée et voyait le projet "pratique" (investir dans l'immobilier, être propriétaire, se construire un patrimoine, etc.). Elle m'a beaucoup soutenu face aux critiques que mon conjoint et moi avons entendu (soit trop de travaux, soit trop cher, soit trop grand, soit trop petit...). Mais quand ça s'est concrétisé, j'ai senti qu'à chaque bonne nouvelle, elle plaçait constamment un argument négatif derrière.
Concernant les enfants, je n'en désire pas tout de suite et mon amie partage cette même idée. Mais je commence à m'inquiéter et à me demander comment ça se passera le jour où je me déciderai à en avoir un. Va t-elle me critiquer comme toutes les mères qu'elle croise sur les réseaux ? Nous faisons des débats entiers sur ça ... Son mari souhaitait d'ailleurs avoir des enfants. Elle dit toujours qu'ils auraient sûrement tenter d'avoir un bébé après le mariage, mais que finalement, ça aurait été égoïste, car seul son mari était prêt à l'époque, pas elle. Je me demande si elle ne rejette pas toutes idées autour des enfants et de la grossesse de ce fait.
J'ai récemment pris conscience que j'étais complètement dépassée par la situation et que mes projets étaient freinés par les centaines de message que j'échangeais avec elle chaque jour. Ses interventions et ses remarques me blessent et me frustre de plus en plus, au point que j'ai une boule au ventre avant d'ouvrir ses messages. Elle a récemment été trop loin dans une discussion où je lui parlais de l'un de mes proches malades et où elle ne m'a pas rassuré mais plutôt mis en panique totale, alors que la situation n'était pas aussi grave qu'elle l'avait décrite. Elle n'a pas arrêté de me demander comment j'allais vis à vis de ce sujet les jours suivants et je lui ai dit que je ne m'impliquerais plus autant pour les autres.
Quelques jours plus tard, je lui ai fais comprendre que je voulais me concentrer sur mes projets pros et perso en restant dans ma bulle. Elle m'a tout de même proposé de passer boire un café, mais j'ai refusé. Elle m'a souvent reproché que l'on se voyait peu et qu'elle n'aimait pas le rythme des messages quotidiens. Je lui ai rappelé qu'auparavant, on ne se voyait quasiment jamais et que je n'étais moi même pas habituée à ce nouveau rythme.
C'est une personne très généreuse qui tente de me rendre la pareille alors que je n'attends rien en retour. Je ne suis pas à sa place et je ne peux que compatir à sa douleur et lui apporter tout le soutien possible. Elle a perdu l'amour de sa vie et je n'imagine pas la douleur horrible qu'elle peut ressentir au quotidien. Je culpabilise de parler de mes problèmes après tout ce qu'elle a pu vivre, mais j'ai de plus en plus de mal à partager mes réussites et mes projets avec elle parce que ce n'est pas sincère. Je sens que certains compliments sont forcés et qu'elle n'a pas envie de se réjouir. Je ne peux pas lui en vouloir, mais je lui ai donné énormément d'attention, quitte à m'oublier parfois. Mon conjoint est exceptionnel et a été très présent et compréhensif. Je ne sais pas si d'autres auraient été aussi patients. Mais aujourd'hui, mes projets prennent de l'ampleur et j'ai besoin de m'accomplir. Je ne veux plus être blessée par les réponses de mon amie et malgré lui avoir déjà dit, c'est quelque chose qu'elle n'arrive pas à intégrer. Je ne pourrais pas l'aider au mieux si je suis dans cet état d'esprit de toute façon.
Je n'ai pas envie de mettre fin à cette amitié mais cette situation a beaucoup d'impact sur ma propre vie. Je culpabilise de m'éloigner petit à petit parce que j'ai le sentiment de la délaisser, mais m'éloigner me fait un bien fou et je me sens libérée ... Je regrette que mon amie ait changé de cette façon, même si je ne pourrais jamais lui en vouloir. J'aimerais lui parler franchement et lui dire que je souhaite m'éloigner, mais je ne voudrais pas lui faire du mal alors qu'elle est encore assez fragile et qu'elle compte sur moi finalement...
Merci de m'avoir lu jusqu'ici et merci d'avance pour vos réponses éclairées ... Vous ne savez pas à quel point ce sujet me préoccupe ...