La sexualité féminine et son histoire

En explorant l’aspect comportemental de la sexualité nous apprenons non seulement ce que les gens font, mais nous comprenons aussi mieux comment et pourquoi ils le font.

2 NOV. 2021 · Lecture : min.
La sexualité féminine et son histoire

« Cette jouissance qu'on éprouve et dont on ne sait rien, n'est-ce pas ce qui nous met sur la voie de l'existence ? Et pourquoi pas interpréter une face de l'Autre, la face de Dieu, comme supportée par la jouissance féminine ? » J. Lacan

La sexualité attire l'attention des gens à travers chaque époque. Les thèmes de la sexualité sont largement reflétés dans l'art et la littérature. Religion, philosophie, tout ce qui forme la moralité et le comportement d'une personne a toujours cherché à établir certaines limites et interdictions. À différentes périodes historiques, des maladies, la créativité humaine, son agressivité, ses troubles émotionnels, ainsi que la florescence ou la décadence de la culture, s'expliquaient par une activité sexuelle trop intense ou, au contraire, insuffisante, ainsi que l'excentricité de l'orientation sexuelle ou des idées.

En étudiant la sexualité à travers le prisme des aspects biologiques, psychosociaux, comportementaux et culturels, nous acquérons en réalité des connaissances sur la nature humaine dans toute sa complexité et sa diversité.

FREUD considérait le sexe comme une puissante force psychique et biologique, tandis que d'autres auteurs mettent l'accent sur ses aspects sociologiques et culturels. Aujourd'hui dans notre vie de tous les jours, le mot « sexe » est utilisé pour désigner les rapports sexuels. Le mot «sexualité» est compris de manière plus large car il désigne tout ce qui touche au sexe. La sexualité est l'une des facettes d'une personne donnée et pas seulement sa capacité de réaction érotique.

L'aspect psychologique est inhérent à tout problème sexuel et la formation de l'auto-identification sexuelle d'une personne en cours de développement est un aspect qui joue un rôle dominant. La conscience d'un enfant de son appartenance au sexe masculin ou féminin se forme principalement sous l'influence de facteurs psychosociaux. Les perceptions de la petite enfance d'un individu donné sur son rôle sexuel sont largement basées sur ce que les parents, les pairs et les enseignants lui inculquent. En plus de l'aspect psychologique, la sexualité a un aspect social prononcé, puisque les relations sexuelles entre les personnes sont régies par des lois, des interdictions.

Les problèmes physiques tels qu'une maladie, des blessures ou des drogues peuvent modifier les réponses sexuelles. Les sentiments d'anxiété, de culpabilité, de honte ou de dépression et les conflits dans les relations personnelles peuvent interférer avec l'activité sexuelle.

Les jugements moraux sont différents selon les peuples et selon les siècles. De nombreux principes moraux liés au sexe sont associés à certaines traditions religieuses ; en même temps la religion n'a pas le monopole de la moralité. Il n'y a pas de système de valeurs sexuel qui soit vrai pour tous et aucun code moral ne peut être indiscutablement correct et applicable dans tous les cas.

Une nouvelle attitude envers le sexe et la sexualité

Plusieurs tendances ont joué un rôle important dans le développement d'une nouvelle attitude envers le sexe et la sexualité au cours des dernières décennies. Comme la libération des stéréotypes sexistes. Traditionnellement les femmes et les filles étaient considérées comme sexuellement passives tandis que les hommes se voyaient attribuer le rôle d'agresseurs sexuels. C'est un homme qui devait initier des relations sexuelles et une femme qui était active ou ne cachait pas son plaisir charnel était regardée de travers. Pour beaucoup, ces points de vue ont maintenant été remplacés par des idées sur l'égalité des partenaires sexuels. Il y a plus d'ouverture sur le sexe. Ce changement a touché tous les médias, de la télévision et du cinéma à la presse. En conséquence, le sexe n'est plus considéré comme quelque chose de honteux et de mystérieux. La troisième tendance est la diffusion d'attitudes envers le sexe comme moyen d'obtenir du plaisir et de soulager les tensions. La prédominance du sexe relationnel et récréatif au cours des dernières années a été en partie due aux améliorations de la contraception et aux préoccupations concernant la surpopulation.

L'histoire de la sexualité

Il est intéressant d'étudier l'histoire de la sexualité. Dès le premier millénaire avant JC, il y avait une interdiction claire du mariage entre parents proches, la femme était considérée comme une propriété utilisée pour satisfaire les besoins sexuels et pour la procréation. Les hommes pouvaient avoir plusieurs épouses, la prostitution était répandue et le sexe était perçu comme une partie essentielle de la vie. La Bible contient des règles de comportement sexuel : l'adultère est interdit, et l'homosexualité est fermement condamnée. Cependant le sexe est reconnu comme une force créative et agréable. En période de la Grèce Antique certaines formes d'homosexualité masculine étaient socialement normalisées. Les relations sexuelles entre un homme adulte et un garçon pubère étaient répandus et généralement justifiés par le souci de l'aîné pour le développement moral et intellectuel du jeune homme. Une grande importance était attachée au mariage et à la famille, mais en même temps les femmes ne pouvaient être considérées comme des citoyennes. Contrairement au judaïsme, qui ne séparait pas l'amour physique de l'amour spirituel, l'enseignement chrétien empruntait aux Grecs la distinction entre "eros", ou amour charnel, et "agape", - amour spirituel et incorporel. Saint Augustin affirmait que la luxure est le résultat du bannissement d'Adam et Eve du jardin d'Eden, qui les a éloignés de Dieu. À la même époque, le Kamasutra, un guide sanscrit complet sur le sexe, a été créé ; des livres similaires étaient écrits en Chine et au Japon.

Tout au long des XIIe et XIIIe siècles, alors que l'Église gagnait de plus en plus d'influence, l'attitude envers la sexualité caractéristique du christianisme primitif s'est renforcée en Europe. Au cours de cette période, de nouvelles coutumes ont commencé à émerger parmi les classes supérieures, ce qui a conduit à une division nette entre la vie réelle et les enseignements religieux. Ces coutumes, appelées « amour courtois », ont créé un nouveau style de comportement quand les femmes (au moins les femmes de haut rang) ont été placées sur un piédestal et le romanesque, le mystère et la valeur ont été glorifiés dans des chansons, des poèmes et des livres. L'amour pur était considéré incompatible avec le plaisir sexuel. C'est à cette période que la ceinture de chasteté a été créée.

Au milieu du XIXe siècle, avec le début de l'ère victorienne, il y a eu un retour à la modestie et à la retenue des comportements ostentatoires en Europe, mais cette fois, c'était moins lié aux attitudes religieuses. La tendance générale à cette époque était la suppression de la sexualité et le fort désir de pudeur. Durant cette époque il avait des attitudes généralement négatives à l'égard du sexe, cependant elle a été marquée par l'émergence généralisée de la littérature et des dessins pornographiques. Il est clair que de nombreuses femmes ont souffert de répression sexuelle imposée par l'époque victorienne, mais en analysant plus profondément cette situation cela donne l'impression que les femmes qui ont encouragé avec fanatisme le puritanisme étaient en fait assez proches des féministes d'aujourd'hui. Les femmes victoriennes ont essayé de trouver une sorte de liberté sexuelle en niant leur sexualité afin d'éviter d'être traitées comme un objet destiné au plaisir sexuel. La science et la médecine ont pleinement reflété l'anti sexualité de cette époque. La masturbation a été stigmatisée, l'accusant de nuire au cerveau et au système nerveux et de provoquer la folie et une grande variété d'autres maladies.

À la fin de ce siècle, le psychiatre allemand Richard von KRAFT-EBING a créé une classification détaillée des troubles sexuels. Son influence a eu des aspects à la fois positifs et négatifs : d'une part, il a insisté sur l'attitude de compassion des médecins à l'égard de la soi-disant perversion sexuelle et sur la révision des lois, et d'autre part, dans son livre le sexe, le crime et la violence étaient quand même amalgamés.

Avec plus de succès que quiconque avant ou après lui, S. FREUD a démontré la centralité de la sexualité dans la vie humaine. Ses brillantes découvertes sont le résultat non seulement de ses propres observations mais aussi de sa capacité à généraliser et à formuler les idées d'autres chercheurs. Selon lui la sexualité est la principale force qui motive tout comportement humain et la principale cause de toutes les formes de névrose : une maladie dont la manifestation la plus frappante est le sentiment d'anxiété et une altération de l'adaptation mentale tout en maintenant une perception adéquate de la réalité. Selon lui la pulsion sexuelle (la libido) est la source de toute l'énergie psychique de l'individu même des sentiments «non sexuels » comme l'amour de soi, l'aimance parentale et filiale, l'amitié, l'aimance de l'humanité, même l'attachement aux objets concrets et aux idées abstraites. Cette interprétation large de la libido a amené des accusations de pansexualité et d'exagération du rôle de la sexualité.

H. ELLIS a reconnu la prévalence généralisée de la masturbation chez les deux sexes à tous les âges et s'est opposé à la notion victorienne selon laquelle les femmes «décentes» n'ont pas de désirs sexuels et a souligné les causes psychologiques plutôt que physiques de nombreux problèmes sexuels. Dans ses œuvres, l'attention a également été portée sur la diversité des comportements sexuels humains ; ils ont servi de contrepoids important à l'influence de KRAFT-EBING, qui considérait la déviation sexuelle comme une pathologie.

Vers la fin de la Première Guerre mondiale des changements importants dans la société ont commencé à la fois en Europe et en Amérique en éloignant de plus en plus les attitudes de l'ère victorienne. La liberté sociale et économique plus large ont rendu le comportement sexuel des gens de moins en moins restreint et cela s'est accompagné de changements correspondants dans la mode, la danse et la littérature. Les femmes ont participé activement à l'approche de la révolution sexuelle. L'entrée de l'Angleterre et des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale, la profondeur et le drame des événements de ces années ont créé le contexte d'un changement complet dans la nature des relations sexuelles des deux côtés de l'Atlantique. Les femmes qui devaient travailler et même servir dans l'armée se sont soudainement senties économiquement libres et indépendantes mais cette liberté a simultanément créé une atmosphère de chaos de mariages précipités, de divorces, de solitude et de peur.

La liberté sexuelle de la femme

Les jeunes des années soixante en se rendant compte de l'injustice politique et sociale ont rejoint avec enthousiasme le mouvement des femmes. Étant donné que les pilules contraceptives ont donné aux femmes beaucoup plus de contrôle sur leur propre destin, il n'est pas surprenant que leur liberté sexuelle soit de plus en plus acceptée comme un état de fait naturel. Les conséquences durables de cette nouvelle liberté sexuelle ont été multiples : augmentation du concubinage, légalisation de l'avortement, exclusion de l'homosexualité de la liste des troubles mentaux, la société a reconnu que le viol constitue un crime généré non par la passion mais par la cruauté, développement de méthodes de fécondation in vitro. Dans la société des années 1970 et 1980 des épidémies de maladies sexuellement transmissibles: l'herpès génital et surtout le SIDA ont mis un terme à la période de libération sexuelle.

Il n'y a pas si longtemps la société croyait que les femmes étaient moins sexuelles que les hommes. Par conséquent, le problème de la dysfonction sexuelle féminine ne semblait pas exister. Les conceptions traditionnelles de la sexualité de la femme ont été complètement réfutées et ses besoins sexuels ont été reconnus comme tout à fait légitimes.

Les femmes ont commencé à se demander de plus en plus si tout était en ordre dans leur sphère sexuelle. Une femme qui se sent insuffisamment sexuellement réactive pour une raison ou une autre éprouve de la confusion, des bouleversements ou une dépression de la même manière qu'un homme. Pour tenter de faire face à cela, elle peut éviter les rapports sexuels, trouver des excuses ou « travailler » avec diligence sur le sexe à la recherche de la « bonne technique » qui lui permettrait d'exprimer ses capacités sexuelles.

Étant donné que la satisfaction sexuelle est étroitement liée à l'évaluation psychologique des relations intimes et que le degré de cette satisfaction dépend du niveau de maturité psychosexuelle, de l'âge, de l'expérience sexuelle, des attitudes de la personnalité et bien plus encore, je crois qu'une harmonie sexuelle est possible presque pour n'importe quel couple.

La sexualité épanouie passe par un apprentissage à s'aimer, y compris sexuellement, afin de partager cette amour avec l'autre dans l'intimité et dans le plaisir.

Photos : Shutterstock

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Écrit par

Daria Surova Bénédite

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Bibliographie

  • P.LOPEZ, F-X.POUDAT « Manuel de Sexologie », Elsevier Masson, 2013

  • F.DOLTO « Sexualité féminine », folio essais, 1996

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