Le syndrome de la cabane : comment surgit-il et comment en sortir ?

La question du syndrome de la cabane est sur toutes les ondes et les pages... De quoi s'agit-il ? Faut-il s'en inquiéter ? Lisez mon analyse...

26 MAI 2020 · Lecture : min.
Le syndrome de la cabane : comment surgit-il et comment en sortir ?

Depuis quelques jours, que ce soit dans la presse écrite ou aux informations, vous entendez beaucoup parler du syndrome de la cabane. Mais qu'est-ce donc ? Comment surgit-il et comment en sortir ? Aujourd'hui je vous raconte.

Je vous raconte votre histoire depuis le milieu du mois de mars. Le 17 mars 2020, une décision a été énoncée à toute une population. Celle du confinement. Les premières heures, jours, ont été déstabilisants, inquiétants, pour beaucoup d'entre vous. Rompre avec votre vie sociale, vos activités habituelles, vos distractions, a pu être source d'une grande angoisse. Il fallait donner du sens à ce confinement.

Comprendre, accepter et faire le choix ensemble de rester chacun chez soi pour protéger le plus grand nombre et aider les soignants à ne pas avoir à trier les patients. Aussi, je vous ai accompagné chaque jour à distance pour que vous puissiez vous inscrire au mieux dans cette nouvelle façon de vivre. Pour faire de ce moment, de cette période, de ce contexte, un moment de découverte de vous, votre désir, vos souffrances, le sens que vous donnez à votre existence, vos relations...

Une vraie épopée que vous avez pour beaucoup traversé en faisant face à d'intenses émotions, inquiétudes.Mais passé les premiers jours, un quotidien s'est installé. Et progressivement, pour certains d'entre vous, un rythme s'est dessiné.Un rythme, hors du rythme habituel. Ce rythme ce fut principalement le vôtre. Votre être s'est complètement inscrit dans des repères fixes et familiers aussi bien d'un point de vue temporel que spatial.Votre maison est devenue un cocon, un nid, dans lequel vous avez trouvé des repères, loin du monde extérieur.Monde extérieur devenu tout à coup hostile... incertain... dangereux... Et ce temps passé dans ce huis clôt s'est étiré... quinze jours... un mois.... six semaines... Tous ces jours à observer le monde de loin.

Qu'est-ce que le syndrome de la cabane ?

Et un jour... le 11 mai... la porte s'ouvre. Elle s'ouvre sur un monde bouleversé. Elle s'ouvre sur un monde différent. Elle s'ouvre sur un monde pas encore complètement accessible.Un monde dont vous ne connaissez plus les codes. Un monde jalonné de nouvelles contraintes. Alors vous hésitez à l'ouvrir cette porte. Là où vous avez eu peur de la fermer, peur de souffrir de cet éloignement social, peur d'être privé de multiples plaisirs, vous vous rendez compte que cette porte vous protégeait. Vous protégeait d'un monde qui vous semble bien compliqué à investir à nouveau.

Alors peut-être faut-il juste l'entrebailler cette porte pour pouvoir revenir très vite se réfugier à l'intérieur du nid.Et puis ce rythme que vous avez pris, seul au milieu de cette immensité, ce rythme vous plaît. Ce temps suspendu ne fut pas si douloureux. Vous avez peut-être pu enfin penser à vous. Seul ou soudé avec votre amoureux, vos enfants... Alors sortir ?.... Et puis sortir pour aller où ? Les lieux qui étaient synonymes de plaisir sont fermés. Les lieux de retrouvailles sont fermés. L'Autre est devenu presque suspect... Vous n'avez alors qu'une envie, rester dans votre nid. Dans votre vie protégée du danger et des Autres. Mais ce n'est pas réel... sauf à vouloir vivre en autarcie... loin de la société et des autres. Alors que faire ?

Comment s'en sortir ?

Prendre la décision de se soustraire totalement au monde ? Se forcer à affronter l'extérieur ? La fatigue vous envahit... à vivre ces mouvements contradictoires. Se replier chez Soi.... puis devoir quitter son antre. Des repères qui s'envolent... Et l'angoisse qui s'infiltre... On l'accueille cette angoisse ?Oui, on l'écoute. Que dit-elle ? Qu'il faut du temps... et des mots... Du temps pour trouver de nouveaux repères dans ce monde chahuté. Du temps pour observer et décider comment pouvoir vous inscrire dans ce retour à une vie sociale. Du temps pour quitter ce refuge que votre maison incarnait et dans laquelle votre être s'est peut-être ressourcé, découvert, apaisé. Si c'est le cas, ayez confiance.

Ce que vous avez découvert de vous et des personnes qui partagent votre intimité avec lesquelles vous souhaiteriez poursuivre ce lien, peut continuer à exister, même dans le monde extérieur. Cet apaisement doit être avant tout intérieur. Ce n'est pas le cadre qui doit générer en vous l'apaisement, il y contribue certes mais il ne fait pas tout. L'harmonie, l'équilibre, la sérénité sont à trouver, inscrire, en vous. Donc aujourd'hui, prenez le temps de découvrir ce monde qui se trouve derrière votre porte. N'ayez pas peur. Vous y avez votre place. Nous sommes tous dans le même bateau. À nouveau.

Même si certains ayant soufferts de solitude, de mal être dans cette confrontation à Soi, attendaient avec impatience que cette porte vole en éclats. Ceux-là ont voulu tout de suite reprendre leur vie d'avant. Sur le canal Saint Martin, sur les bords de Seine.Mais ils étaient arrêtés. Oui, ce monde n'est plus le monde d'avant. Vous devez l'habiter autrement. Est-ce possible ? Oui... seul grâce aux découvertes sur vous... connaissances qui vous permettent aujourd'hui de vous adapter, d'inventer. Ou accompagné d'un thérapeute qui vous aidera à traverser cette nouvelle étape.

À vous de vous inscrire aujourd'hui dans ce monde, avec toutes les découvertes que vous avez pu faire sur vous et vos intimes. Le monde est peut-être différent mais vous aussi. Vous avez beaucoup appris. Appris dans cette vulnérabilité de l'être que vous ne vouliez plus forcément voir. Appris dans cette capacité que vous avez eu à pouvoir vivre presque deux mois isolé. Appris sur vous et vos questionnements chaque jour. Appris sur ceux qui partagent votre vie. Appris sur une façon de vivre qui n'était pas si acquise. Oui vous avez tant appris. Or apprendre ouvre les portes. Un peu plus. Cette porte, vous saurez à nouveau l'ouvrir. Écoutez... observez... ce monde est peut-être changé mais il est peuplé d'Autres... qui sont comme vous...

Photos : Shutterstock

PUBLICITÉ

Écrit par

Perrine Déprez

Psychologue psychanalyste et psychothérapeute, avec plus de quinze ans d'expérience. Son objectif est d'aider les personnes à savoir vivre pleinement, à apprendre à s'accepter telles qu'elles sont, à développer leur estime de soi et à nouer une relation profonde et saine avec leurs proches.

Voir profil
Laissez un commentaire

PUBLICITÉ

derniers articles sur anxiété

PUBLICITÉ